Les symboles Ă©gyptiens anciens et leur signification Rempli de nombreux mystĂšres et d'une grande spiritualitĂ©, la mythologie et la culture des anciens Ăgyptiens sont certainement une partie importante de l'histoire de la civilisation. Certes, dans une mesure limitĂ©e seulement, nous sommes aujourd'hui en mesure de comprendre les hiĂ©roglyphes dĂ©crivant les Ă©vĂ©nements qui se sont produits pendant l'Ăąge des dit, la connaissance du symbolisme Ă©gyptien est essentielle pour mieux comprendre cette Ă©poque. Pour ceux qui se demandent, voici les symboles Ă©gyptiens anciens les plus importants et leur signification Ankh, le symbole de vie Ă©gyptien. En tant que symbole le plus couramment utilisĂ© parmi les symboles Ă©gyptiens anciens, l'Ankh qui est Ă©galement connu sous le nom de croix ansĂ©e par les chrĂ©tiens coptes et reprĂ©sente la vie et l' a Ă©galement Ă©tĂ© utilisĂ© comme symbole de l'union entre les hommes et les femmes, en particulier l'union d'Osiris et d'Isis, dont on pensait qu'elle inondait le fleuve du Nil, apportant ainsi la fertilitĂ© Ă l'Egypte. C'est la raison pour laquelle l'ankh est aussi appelĂ© la Clef du Nil. En plus d'ĂȘtre utilisĂ© comme symbole du pouvoir purificateur et vivifiant de l'eau et de la clairvoyance la capacitĂ© de voir "l'au-delĂ ", l'ankh Ă©tait considĂ©rĂ© comme "la clĂ© de l'Ă©ternitĂ©", "la clĂ© du monde des morts".Parfois, les chevilles Ă©taient dessinĂ©es sur les murs des temples, car on croyait qu'elles offraient une protection divine. L'Oeil d'Horus Aussi connu sous le nom de Oudjat, le symbole de l'Ćil d'Horus reprĂ©sente la protection, la guĂ©rison, la bonne santĂ© et le pouvoir est aussi connu comme le symbole de la lune. Les anciens Egyptiens croyaient que les amulettes portant l'Oeil d'Horus avaient des pouvoirs de d'Horus a Ă©galement Ă©tĂ© utilisĂ© comme un outil mĂ©dical pour mesurer les ingrĂ©dients pendant la prĂ©paration des mĂ©dicaments. Selon le mythe, Horus et Seth se battaient pour remplacer Osiris aprĂšs sa mort et Seth a crevĂ© l'Ćil gauche d' ou Toth guĂ©rit l'Ćil en utilisant la magie sur certaines parties et Seth offrit l'Ćil Ă son pĂšre, Osiris, pour le ramener Ă la vie. C'est la raison pour laquelle l'Oeil d'Horus est aussi connu comme le symbole du sacrifice. L'Ćil de la Providence l'Ćil maçonnique qui voit tout sur les billets de banque en dollars amĂ©ricains est dĂ©rivĂ© de l'Ćil d' vous souhaitez en savoir plus sur l'Ćil d'Horus, Ă©galement connu sous le nom d'Ćil Ă©gyptien. L'Oeil de RĂȘ Il existe diffĂ©rents mythes concernant l'origine du symbole de l'Oeil de RĂȘ. Cependant, la plupart des experts croient que le symbole Ă©tait en fait l'Ćil droit d'Horus et est devenu connu comme l'Ćil de RĂȘ/RĂȘ dans le temps. Les deux symboles reprĂ©sentaient pour la plupart les mĂȘmes concepts. Cela dit, selon diffĂ©rents mythes, le symbole de l'Oeil de RĂȘ a Ă©tĂ© identifiĂ© comme la personnification de nombreuses dĂ©esses dans la mythologie Ă©gyptienne telles que Wadjet, Hathor, Mut, Sekhmet et Bastet. RĂȘ/RĂȘ est le dieu du soleil dans la mythologie Ă©gyptienne. Par consĂ©quent, l'Oeil de RĂȘ symbolise le soleil. Ouroboros Ouroboros dans la mythologie Ă©gyptienne Ă©tait l'un des symboles du soleil car il reprĂ©sentait les voyages d'Aton, le disque solaire dans la mythologie plus, l'ouroboros reprĂ©sentait la renaissance, la rĂ©crĂ©ation de la vie et la perpĂ©tuitĂ©. Dans le Livre des Morts, "le serpent qui se mange lui-mĂȘme/le serpent qui se mange la queue" est Ă©troitement associĂ© Ă Atoum, le premier dieu qui est nĂ© des eaux chaotiques de Nun l'eau primordiale dont toute la crĂ©ation a commencĂ© en premier lieu, car il est nĂ© de ces eaux sous la forme d'un serpent qui se renouvelait chaque matin. Les Egyptiens ont transmis le symbole de l'ouroboros aux PhĂ©niciens qui l'ont finalement transmis Ă la culture grecque. Le nom ouroboros a Ă©tĂ© donnĂ© au symbole par les connu sous le nom de symbole de l'infini, l'ouroboros est un symbole trĂšs utilisĂ© dans le monde entier, y compris dans la mythologie nordique oĂč il est connu sous le nom de vous souhaitez en savoir plus, cliquez ci-dessous pour lire notre article dĂ©taillĂ© sur les ouroboros, le symbole de l'infini, son histoire et ses usages dans diffĂ©rentes cultures Ă travers l'histoire. Amenta Le symbole Amenta dans la culture Ă©gyptienne ancienne reprĂ©sente la Terre des Morts les Enfers.Amenta Ă©tait Ă l'origine utilisĂ© comme symbole de l'horizon oĂč le soleil se couchait. Avec le temps, il a Ă©tĂ© utilisĂ© pour reprĂ©senter la rive ouest du Nil. Comme c'est aussi lĂ que les Ăgyptiens enterraient leurs morts, on pense que c'est la raison pour laquelle amenta est devenu le symbole du monde souterrain dans le temps. ScarabĂ©e Le prochain sur notre liste est le ScarabĂ©e, l'un des symboles les plus importants de l'Ăgypte ancienne. Le scarabĂ©e Scarabaeus sacer, Ă©galement connu sous le nom de Bousier, reprĂ©sente le soleil, la rĂ©crĂ©ation de la vie/rĂ©surrection et la transformation. En voyant les scarabĂ©es bousier rouler des boules de fumier comme source de nourriture, les anciens Egyptiens croyaient que ces scarabĂ©es recrĂ©aient la c'Ă©tait parce qu'ils confondaient les Ćufs pondus et enfouis dans le sable par les scarabĂ©es femelles avec les rouleaux faits comme source de nourriture. Par consĂ©quent, ils pensaient que ces colĂ©optĂšres "crĂ©aient la vie Ă partir de rien". Pilier Djed Le pilier Djed, Ă©galement connu sous le nom de "colonne vertĂ©brale d'Osiris", est le symbole qui reprĂ©sente la force et la stabilitĂ© dans la culture Ă©gyptienne est associĂ© Ă Ptah, le dieu de la crĂ©ation et Ă Osiris, le dieu des enfers et des qu'il ait d'abord Ă©tĂ© connu comme le symbole de Ptah, le culte d'Osiris a adoptĂ© Ă temps le symbole du pilier djed. C'est de lĂ que vient le nom "l'Ă©pine dorsale d'Osiris".Les Egyptiens croyaient que le pilier Djed Ă©tait en fait la combinaison des quatre piliers qui retenaient les quatre coins de la terre. Tiet - Le noeud d'Isis Tiet/Tyet, aussi connu comme le nĆud d'Isis et le sang d'Isis, est un symbole Ă©gyptien qui ressemble beaucoup au symbole ankh. Sa signification a Ă©galement Ă©tĂ© interprĂ©tĂ©e comme Ă©tant similaire Ă celle de l'ankh. Il est supposĂ© symboliser la Ă©tait gĂ©nĂ©ralement identifiĂ©e Ă la dĂ©esse Isis et surtout utilisĂ©e avec le pilier ankh et Djed d'Osiris, c'est pourquoi elle Ă©tait interprĂ©tĂ©e comme la double nature de la n'y a aucune information prĂ©cise ou suggestion valable concernant le nom du Sang d'Isis mais il est supposĂ© ĂȘtre donnĂ© Ă Tiet car il reprĂ©sentait le sang menstruel d'Isis et les pouvoirs magiques qu'il donnait. Symbole Ka / Esprit Ka Le symbole Ka dans l'un des symboles Ă©gyptiens les plus complexes utilisĂ©s dans les hiĂ©roglyphes. C'est parce qu'il reprĂ©sentait trois concepts spirituels diffĂ©rents. Ka Ă©tait le symbole de recevoir la vie d'autres hommes et dieux en plus d'ĂȘtre la source de ces pouvoirs et le double spirituel de tout homme mot "ka" signifie littĂ©ralement "esprit" ou "Ăąme" et on croyait qu'il reprĂ©sentait l'Ăąme que les dĂ©esses Heket ou Meskhenet insufflaient aux bĂ©bĂ©s Ă leur Ă©tait aussi le double spirituel nĂ© avec chaque ĂȘtre humain. Il a vĂ©cu, mais il n'est pas mort avec cette personne et il a vĂ©cu aussi longtemps qu'il avait un endroit oĂč vivre. C'est-Ă -dire, tant qu'il avait un corps dans lequel l'une des principales raisons pour lesquelles les anciens Egyptiens momifiaient leurs morts. On croyait qu'une personne perdrait la chance d'avoir une vie Ă©ternelle si son corps se dĂ©composait, causant ainsi la mort de son ka. Ba En forme d'oiseau le plus souvent un faucon avec une tĂȘte humaine, le symbole Ba Ă©tait reprĂ©sentĂ© comme un oiseau quittant ou entrant dans la tombe de quelqu'un ou Ă cĂŽtĂ© de son corps mot "Ba" pourrait ĂȘtre interprĂ©tĂ© comme "Ăąme" ou "esprit" bien que "manifestation spirituelle" serait une traduction plus parce que Ba est connu comme une partie de l'Ăąme dans la croyance Ă©gyptienne ancienne. Plus prĂ©cisĂ©ment, on croyait que Ba Ă©tait le caractĂšre unique d'un se rapproche de la signification de "personnalitĂ©" par l'absence d'un meilleur mot. Selon cette croyance, mĂȘme un objet inanimĂ© pourrait avoir indiquĂ© dans les Textes du cercueil, Ba a vu le jour aprĂšs la mort d'une personne et a rejoint Ka, l'essence de la vitalitĂ© dans l'au-delĂ , tandis que certaines personnes croyaient qu'elle existait avant la mort et ont survĂ©cu Ă cette Ćœabkar, Ă©gyptologue de renom, suggĂ©ra que Ba qui ressuscita aprĂšs la mort Ă©tait la personne elle-mĂȘme, l'existence physique de cette personne plutĂŽt qu'un ĂȘtre immatĂ©riel. La plume de MaĂąt La plume de MaĂąt/Ma'at est l'un des symboles Ă©gyptiens les plus courants utilisĂ©s dans les hiĂ©roglyphes. La dĂ©esse MaĂąt reprĂ©sentait la justice dans la culture Ă©gyptienne et la Plume de MaĂąt peut ĂȘtre vue dans le contexte d'"assurer la justice" dans les inscriptions parce que les anciens Egyptiens croyaient que leur cĆur serait pesĂ© contre la Plume de MaĂąt dans la Salle des Deux VĂ©ritĂ©s lorsque leur Ăąme entrerait dans DouĂąt le Monde des Morts.Si son cĆur s'avĂ©rait Ă©gal ou plus lĂ©ger que cela signifierait qu'il Ă©tait une personne vertueuse et qu'il irait Ă Aaru paradis dirigĂ© par Osiris.Sinon, son cĆur serait dĂ©vorĂ© par Ammit, la dĂ©esse mangeuse d'Ăąme, et il serait maudit pour rester aux Enfers pour toujours. Ouas Le symbole Ouas ou le sceptre Ouas Ă©tait le symbole du pouvoir dans la culture Ă©gyptienne ancienne. Elle reprĂ©sentait la domination des dieux, c'est-Ă -dire une domination et une puissance divine plutĂŽt qu'une puissance la croyance, elle assurait Ă©galement la continuitĂ© de la prospĂ©ritĂ© d'un roi. Deshret Deshret, aussi connu sous le nom de Couronne Rouge d'Egypte, est le symbole qui reprĂ©sente la Basse Egypte, les terres de la dĂ©esse Wadjet. Il est Ă©galement utilisĂ© comme symbole de Kemet, les terres fertiles du territoire de Seth. Hedjet Hedjet la Couronne Blanche Ă©tait l'une des deux couronnes de l'Egypte qui reprĂ©sentaient le royaume de Haute Egypte. Il a Ă©tĂ© combinĂ© avec la Couronne rouge de Basse-Ăgypte, Deshret, pour former le Pschent, Double Couronne d'Ăgypte lorsque le pays a Ă©tĂ© unifiĂ©. Pschent Le Pschent Ă©tait la Double Couronne d'Egypte composĂ©e de la Couronne Rouge et de la Couronne Blanche, Deshret et Hedjet reprĂ©sentant respectivement la Basse Egypte et la Haute Egypte. Elle reprĂ©sentait l'unitĂ© de l'Egypte et le contrĂŽle total du pharaon sur toute l'Egypte. Anneau de Shen Shen est le symbole du cercle enroulĂ© ou du cartouche dans la culture Ă©gyptienne ancienne qui reprĂ©sente la divinitĂ©. Il Ă©tait surtout utilisĂ© en MĂ©sopotamie et en symbole, qui avait Ă l'origine la forme d'un cercle, Ă©tait parfois utilisĂ© comme cartouche. Ce type d'utilisation visait Ă reprĂ©senter la protection que la personne dont le nom Ă©tait Ă©crit Ă l'intĂ©rieur du symbole Shen, le plus souvent un roi ou une royautĂ©, Ă©tait sous protection divine selon la croyance. ï»ż Uraeus DĂ©rivĂ© du mot "iaret" signifiant "le ressuscitĂ©", Uraeus est un symbole Ă©gyptien ancien significatif qui est fait d'un cobra montant. Le symbole d'Uraeus reprĂ©sentait le lien entre les dieux et les rois/pharaons et les pharaons Ă©taient reconnus avec le symbole d'Uraeus qu'ils a Ă©galement symbolisĂ© l'autoritĂ© et la puissance absolues des dieux et des croyait qu'il donnait des pouvoirs magiques et assurait une protection magique Ă celui qui le portait. Seba Seba Ă©tait le symbole des Ă©toiles dans la culture Ă©gyptienne antique et reprĂ©sentait les dieux des Ă©toiles ou la mythologie Ă©gyptienne, les Ă©toiles Ă©taient appelĂ©es "les disciples d'Osiris" puisqu'elles Ă©taient identifiĂ©es aux Ăąmes des morts dans DouĂąt, l'Enfer. Lorsqu'il est dessinĂ© dans un cercle, le symbole Seba reprĂ©sente DouĂąt. Hekha et Nekhakha Dans la culture Ă©gyptienne ancienne, le symbole de l'escroc du berger Ă©tait le symbole du pouvoir de l'Ătat sur son peuple. Le mot "hekha HqA", qui est aussi une Ă©pithĂšte d'Osiris, signifie "gouverner". De mĂȘme, le flĂ©au nekhakha Ă©tait considĂ©rĂ© comme le symbole du pouvoir royal. Le cĂ©lĂšbre Ă©gyptologue Toby Wilkinson a suggĂ©rĂ© que le symbole du flĂ©au reprĂ©sentait le pouvoir coercitif d'un roi et son contrĂŽle sur ses sujets. Colline Primordiale Le symbole primordial de la colline que l'on retrouve dans les inscriptions Ă©gyptiennes est l'un des symboles les plus anciens qui ont Ă©tĂ© utilisĂ©s. Les Egyptiens croyaient que cette colline avait créé des terres pendant le processus chaotique de la crĂ©ation. On pense qu'il a inspirĂ© l'idĂ©e de construire des pyramides. Le Menat AssociĂ© Ă©troitement Ă Hathor et Ihy, son fils, Menat Ă©tait connu comme le symbole de la dĂ©esse Hathor. En fait, "le Grand Menat" Ă©tait l'un des noms d'Hathor. Le symbole du Menat reprĂ©sentait la vie, la fertilitĂ©, la naissance, la renaissance, la puissance et la Ăgyptiens portaient des amulettes menat en espĂ©rant que cela apporterait prospĂ©ritĂ©, fertilitĂ© et dĂ©sirez en apprendre d'avantages sur la mythologie Ă©gyptienneSi vous ĂȘtes amoureux de lâĂgypte ancienne, n'hĂ©sitez pas Ă dĂ©couvrir les bijoux Ă©gyptiensAidez vous du guide des tailles pour les bagues
Art jaĂŻnuserFlicka CC BY-SA Le JaĂŻnisme est l'une des plus anciennes religions du monde. Le nom vient de jiva Ăąme ou force de vie, Ă©galement ConquĂ©rant Spirituel car il soutient que tous les ĂȘtres vivants possĂšdent une Ăąme immortelle, qui a toujours existĂ© et existera toujours, et que l'Ăąme peut ĂȘtre libĂ©rĂ©e de la souffrance par l'autodiscipline en adhĂ©rant aux principes jaĂŻns. Le JaĂŻnisme est originaire du nord de l'Inde et s'est propagĂ© de lĂ vers le sud, mais on ne sait pas comment il a dĂ©butĂ©. Son fondateur est souvent identifiĂ© Ă tort comme le sage Vardhamana plus connu sous Mahavira, vers 599-527 AEC, mais il n'est en fait que le 24Ăšme tirthankara "bĂątisseur de guĂ©" du JaĂŻnisme. Tout comme les Hindous croient que les Vedas ont toujours existĂ© et n'ont Ă©tĂ© "entendus" et Ă©crits qu'Ă un certain moment dans le passĂ©, les JaĂŻns soutiennent que leurs prĂ©ceptes sont Ă©ternels, ont Ă©tĂ© reconnus par 23 sages Ă travers le temps, pour finalement ĂȘtre Ă©tablis par Mahavira sous leur forme actuelle. C'est une religion non thĂ©iste, elle ne professe pas une croyance en un dieu crĂ©ateur, mais croit en des ĂȘtres supĂ©rieurs les devas, qui sont mortels, et dans le concept de karma dirigeant la vie prĂ©sente de chacun et ses futures incarnations. Cependant, les devas n'ont pas de pouvoir sur les personnes, et ne sont pas recherchĂ©s comme guides ou aides pour se libĂ©rer du lien karmique. Dans le JaĂŻnisme, il appartient Ă chaque individu d'atteindre le salut - dĂ©fini comme la libĂ©ration du cycle de la renaissance et de la mort samsara - en adhĂ©rant Ă un code de comportement spirituel et Ă©thique strict. Ce code est basĂ© sur les Cinq VĆux exprimĂ©s dans l'ouvrage fondamental, le Tattvartha Sutra Ahimsa non-violence Satya dire la vĂ©ritĂ© Asteya ne pas voler Brahmacharya chastetĂ© ou fidĂ©litĂ© au conjoint Aparigraha dĂ©tachement Les Cinq VĆux dirigent les pensĂ©es et le comportement de chacun car on croit que, comme on pense, on agira. Il ne suffit pas de s'abstenir simplement de la violence, du mensonge ou du vol, on ne doit mĂȘme pas penser Ă ces choses. Si l'on adhĂšre Ă cette discipline, on Ă©chappera au cycle du samsara et on atteindra la libĂ©ration. Une fois que l'on a pu accomplir cela, on devient un tirthankara, "un passeur de guĂ©", qui peut montrer aux autres comment traverser en toute sĂ©curitĂ© les courants de la vie en rejetant le dĂ©sir, en se libĂ©rant de l'ignorance, et en refusant les tentations du monde. Dans le JaĂŻnisme, la souffrance est causĂ©e par l'ignorance de la vraie nature de la rĂ©alitĂ©, et la libĂ©ration est obtenue par l'Ă©veil spirituel, puis par la vie dans la vĂ©ritĂ© dont on a pris conscience. Le dĂ©veloppement de la foi de Mahavira eut lieu dans le contexte dâun mouvement gĂ©nĂ©ral de rĂ©forme religieuse en Inde aux 5Ăšme - 4Ăšme siĂšcles AEC en rĂ©ponse Ă l'Hindouisme, foi dominante Ă cette Ă©poque, que certains penseurs jugeaient dĂ©connectĂ© des besoins spirituels et physiques des gens. Ă cĂŽtĂ© du JaĂŻnisme, de nombreuses autres philosophies ou systĂšmes religieux se dĂ©veloppaient Ă cette Ă©poque comme le Charvaka et le Bouddhisme, qui prospĂ©raient pendant un certain temps, puis soit gagnaient du terrain, soit Ă©chouaient. Le JaĂŻnisme a pu survivre et attirer des adeptes grĂące au patronage royal de puissances politiques tels que l'Empire Maurya 322-185 AEC. Il survĂ©cut plus tard Ă des persĂ©cutions sous divers souverains musulmans aux 12Ăšme-16Ăšme siĂšcles EC, rĂ©sista Ă©galement aux efforts des missionnaires chrĂ©tiens au 19Ăšme siĂšcle EC, et se maintint comme une foi fervente jusqu'Ă nos jours. Origines & DĂ©veloppement SELON LA CROYANCE JAĂN, MAHAVIRA N'ĂTAIT PAS LE FONDATEUR DE LA FOI, MAIS SEULEMENT UN DâUNE LONGUE LIGNĂE DE SAGES ĂCLAIRĂS QUI PRIRENT CONSCIENCE DE LA VRAIE NATURE DE LA RĂALITĂ ET DE L'ĂME. Le systĂšme de croyance qui devait finir par se dĂ©velopper en Hindouisme Sanatan Dharma, "l'Ordre Ă©ternel", pour les adeptes arriva dans la vallĂ©e de l'Indus quelque temps avant le 3Ăšme millĂ©naire AEC avec une coalition de tribus aryennes qui migra vers la rĂ©gion depuis l'Asie centrale. Le caractĂšre aryen fait rĂ©fĂ©rence Ă une classe de gens, pas Ă une nationalitĂ©, et signifiait libre» ou noble». Le terme n'avait aucun lien avec les Caucasiens jusqu'aux 19-20Ăšmes siĂšcles EC, et les affirmations concernant une ancienne "Invasion Aryenne" Ă peau claire ont Ă©tĂ© depuis longtemps discrĂ©ditĂ©es. Ces Aryens ont apportĂ© avec eux la langue sanskrite et, aprĂšs qu'ils se soient assimilĂ©s aux peuples indigĂšnes, elle est devenue la langue de leurs textes sacrĂ©s, les Vedas, qui inspirĂšrent l'Hindouisme. Vous aimez l'Histoire? Abonnez-vous Ă notre newsletter hebdomadaire gratuite! Une premiĂšre version de l'Hindouisme Ă©tait le Brahmanisme, qui affirmait que l'univers et le monde fonctionnaient selon des rĂšgles Ă©ternelles mises en mouvement par un ĂȘtre qu'ils appelaient Brahman, qui non seulement faisait fonctionner tout, mais Ă©tait rĂ©alitĂ© absolue lui-mĂȘme. Cette rĂ©alitĂ© - l'Univers - "disait" certaines vĂ©ritĂ©s qui furent finalement "entendues" par d'anciens sages et Ă©crites en sanskrit, qui devinrent les Vedas, fixĂ©es entre 1500 et 500 AEC. Les Vedas furent chantĂ©s par les prĂȘtres hindous, qui les interprĂ©tĂšrent pour le peuple, mais la majoritĂ© ne pouvait pas comprendre le sanskrit, et la pratique et ce problĂšme donnĂšrent lieu Ă des mouvements de rĂ©forme religieuse. Les systĂšmes de croyances philosophiques/religieuses qui en rĂ©sultĂšrent tombaient dans deux catĂ©gories Astika "cela existe", qui acceptait les Vedas comme la plus haute autoritĂ© spirituelle; Nastika "cela n'existe pas", qui a rejetait l'autoritĂ© des Vedas et des prĂȘtres hindous. Les trois Ă©coles nastika qui continuĂšrent Ă se dĂ©velopper Ă partir de cette pĂ©riode Ă©taient le Charvaka, le Bouddhisme et le JaĂŻnisme. Le JaĂŻnisme Ă©tait dĂ©fendu par l'ascĂšte spirituel Vardhamana, connu sous le nom de Mahavira "Grand HĂ©ros", mais les Ă©vĂ©nements de sa vie, mis Ă part cela, sont peu connus. Son lieu de naissance, sa sphĂšre d'influence et son lieu de dĂ©cĂšs sont tous contestĂ©s. On dit qu'il Ă©tait fils de parents aisĂ©s qui moururent quand il avait 28 ou 30 ans. Ă ce moment, il renonça Ă sa richesse et Ă toutes les possessions matĂ©rielles et vĂ©cut la vie d'un ascĂšte religieux pendant les douze annĂ©es qui ont suivi. En prenant conscience de la vraie nature de l'Ăąme et en atteignant l'omniscience kevala jnana, il fut reconnu comme un ConquĂ©rant Spirituel Jina et un tirthankara, aprĂšs quoi il commença Ă prĂȘcher la vision JaĂŻn. Vardhamana MahaviraJules Jain CC BY-NC-SA Selon la croyance JaĂŻn, cependant, Mahavira n'Ă©tait pas le fondateur de la foi, seulement un dâune longue lignĂ©e de sages Ă©clairĂ©s qui avaient perdu leur ignorance et pris conscience de la vraie nature de la rĂ©alitĂ© et de l'Ăąme. Les prĂ©ceptes du JaĂŻnisme, prĂ©tend-on, sont Ă©ternels; ils n'ont jamais Ă©tĂ© produits par aucun mortel, ils ont Ă©tĂ© seulement reçus» par les 24 sages Ă©clairĂ©s qui les ont transmis aux autres. Comme dĂ©jĂ notĂ©, c'est la mĂȘme affirmation que celle faite par les hindous concernant les Vedas. Le chercheur Jeffrey D. Long commente Peut-ĂȘtre que les deux traditions ont Ă©mergĂ© simultanĂ©ment et de façon interdĂ©pendante, partant de diffĂ©rentes rĂ©gions du sous-continent, Ă travers un processus de dialogue, de transformation mutuelle et de synthĂšse qui se poursuit jusqu'Ă prĂ©sent. Jainism, 56 Bien que l'on pense gĂ©nĂ©ralement que le JaĂŻnisme s'est dĂ©veloppĂ© Ă partir de l'Hindouisme, et câest ce que maintiennent les Hindous, cette affirmation est rejetĂ©e par les JaĂŻns eux-mĂȘmes. Croyances Le JaĂŻnisme soutient que tous les ĂȘtres vivants sont animĂ©s par une Ăąme immortelle prise dans le cycle de la renaissance et de la mort causĂ© par la matiĂšre karmique qui s'est accumulĂ©e Ă travers ses actions passĂ©es. L'Ă©tat spirituel initial de chacun attire cette matiĂšre karmique de la mĂȘme maniĂšre qu'une Ă©tagĂšre recueille la poussiĂšre. Une fois que la matiĂšre s'attache Ă l'Ăąme, chacun est liĂ© incarnation aprĂšs incarnation Ă la roue du samsara qui nous rend aveugle Ă la vĂ©ritable nature de l'Ăąme et de la rĂ©alitĂ©. Le chercheur John M. Koller commente la vision jaĂŻn de l'Ăąme L'essence de l'Ăąme jiva est la vie, et ses principales caractĂ©ristiques sont la perception, la connaissance, la fĂ©licitĂ©, et l'Ă©nergie. Dans son Ă©tat pur lorsqu'elle n'est pas associĂ©e Ă la matiĂšre, sa connaissance est omnisciente, sa fĂ©licitĂ© est pure et son Ă©nergie est illimitĂ©e. Mais la matiĂšre qui incarne l'Ăąme souille sa fĂ©licitĂ©, fait obstacle Ă sa connaissance et limite son Ă©nergie. C'est pourquoi la matiĂšre est considĂ©rĂ©e comme une entrave liant l'Ăąme. Le mot pour matiĂšre, pudgala masse-Ă©nergie est dĂ©rivĂ© de pum, signifiant "s'assembler" et gala, signifiant "se sĂ©parer", et rĂ©vĂšle la conception jaĂŻn de la matiĂšre comme ce qui est formĂ© par l'agrĂ©gation d'atomes et ce qui est dĂ©truit par leur dissociation. La matiĂšre renvoie Ă la fois Ă la masse des choses et aux forces d'Ă©nergie qui structurent cette masse, la faisant et la refaisant sous ses diverses formes. Le mot "karma" signifie "faire", et dans le JaĂŻnisme, il se rĂ©fĂšre Ă la fabrication et Ă la refonte de la matiĂšre karmique qui incarne l'Ăąme⊠Cette vision du karma en tant que force matĂ©rielle distingue la vue jaĂŻn des autres vues indiennes qui amĂšnent le karma Ă ĂȘtre seulement une force psychologique ou mĂ©taphysique. 33 Dans l'Hindouisme et le Bouddhisme, le karma est compris comme une action qui, soit encourage la libĂ©ration, soit nous lie plus Ă©troitement au samsara, alors que dans le JaĂŻnisme, il est une fonction naturelle de l'interaction de l'Ăąme avec la rĂ©alitĂ©. L'Ăąme se trouble, Ă nouveau comme avec la poussiĂšre obscurcissant un objet, elle ne peut pas reconnaĂźtre sa vraie nature et par cette ignorance, elle accepte l'illusion de la vie au lieu de sa rĂ©alitĂ©, et elle se condamne Ă la souffrance et Ă la mort. UN ASPECT INTĂRESSANT DE LA FOI EST LâACCENT MIS SUR LES LIMITES DE LA PERSPECTIVE & SUR L'INCAPACITĂ DE CHACUN Ă EXPRIMER UNE VĂRITĂ COMPLĂTEMENT OBJECTIVE. Un aspect intĂ©ressant de la foi - Ă©galement chez Charvaka - est l'accent mis sur les limites de la perspective et, par consĂ©quent, sur l'incapacitĂ© de chacun Ă exprimer une vĂ©ritĂ© complĂštement objective. Les JaĂŻns utilisent la parabole de l'Ă©lĂ©phant et des cinq aveugles pour illustrer ce problĂšme. Chacun des aveugles, convoquĂ© par le roi pour dĂ©finir un Ă©lĂ©phant qui se tient devant eux, touche diffĂ©rentes parties de l'animal et parvient Ă ses propres conclusions. Pour l'un, qui touche les oreilles, un Ă©lĂ©phant est un grand Ă©ventail; pour un autre qui touche une jambe, c'est un gros poteau; pour un autre, qui touche le cĂŽtĂ©, c'est un mur, et ainsi de suite. Chaque aveugle est limitĂ© par la perspective et l'interprĂ©tation individuelle de la mĂȘme maniĂšre que chaque ĂȘtre humain l'est par les limites de ce qu'il peut comprendre dans l'Ă©tat de rĂȘve dans lequel il est de valeurs subjectives, d'ignorance et d'illusion. Afin de se rĂ©veiller et dâatteindre la libĂ©ration de la matiĂšre, il faut faire les Cinq VĆux et ensuite mener Ă bien les actions qui en dĂ©coulent. Ces actions nous mĂšnent sur un chemin en 14 Ă©tapes allant de l'ignorance et la servitude Ă l'illumination et la libertĂ©. Ăcritures, Sectes et Pratiques Ce chemin est suggĂ©rĂ© par les Ă©critures jaĂŻns - les Agamas et, selon certains, les Purvas - censĂ©s avoir Ă©tĂ© "entendus" de l'univers et transmis oralement de gĂ©nĂ©ration en gĂ©nĂ©ration par les tirthankaras. Ă cĂŽtĂ© du Tattvartha Sutra composĂ© du 2Ăšme au 5Ăšme siĂšcle EC, il existe d'autres Ă©critures non acceptĂ©es par tous les JaĂŻns, telles que les Upangas, les Cheda Sutras, les Mula Sutras, les Prakina Sutras et les Culika Sutras transmis par tradition orale jusqu'Ă ce qu'ils soient passĂ©s dans l'Ă©criture. Jeffrey D. Long commente Le problĂšme de la transmission orale est que, si ceux qui portent la connaissance d'un texte meurent avant de la transmettre Ă d'autres, ou aprĂšs ne l'avoir transmise que partiellement, cette connaissance est Ă jamais perdue. Ceci rappelle une situation dans laquelle tous les exemplaires d'un livre donnĂ© sont dĂ©truits⊠Cela semble avoir Ă©tĂ© la situation de la premiĂšre communautĂ© jaĂŻn et c'est la raison pour laquelle il a Ă©tĂ© finalement pris la dĂ©cision de mettre la tradition textuelle sous forme Ă©crite [Ă l'Ă©poque de Chandragupta de l'Empire Maurya, rĂšgne vers 321-297 AEC]. Jainism, 64 Les JaĂŻns sont divisĂ©s en deux sectes majeures bien qu'il y en ait d'autres, les Digambara "vĂȘtus du ciel" et les Svetambara vĂȘtus de blanc» dont les points de vue sur la foi diffĂšrent considĂ©rablement. Les Digambara sont plus orthodoxes, rejettent le canon des Ă©critures Svetambara, croient que seuls les hommes peuvent atteindre la libĂ©ration et que les femmes doivent attendre d'ĂȘtre incarnĂ©es en tant qu'homme pour le faire. Leurs moines vont nus, rejetant mĂȘme le besoin de vĂȘtements conformĂ©ment Ă la tradition selon laquelle Mahavira et ses les 11 premiers disciples ne possĂ©daient rien et ne portaient rien. Le clergĂ© Svetambara porte des vĂȘtements blancs sans couture, ils croient avoir conservĂ© la plupart des Ă©critures originales transmises par Mahavira et reconnaissent que les femmes peuvent atteindre la libĂ©ration aussi bien que les hommes. TĂȘte d'un Tirthankara jaĂŻnJames Blake Wiener CC BY-NC-SA Cette libĂ©ration, comme dĂ©jĂ mentionnĂ©, est rĂ©alisĂ©e en 14 Ă©tapes qui sont basĂ©es sur les Ă©critures et les Cinq VĆux Ătape 1 L'Ăąme languit dans les tĂ©nĂšbres, ignorant sa vraie nature, et esclave des passions et de l'illusion. Ătape 2 L'Ăąme entrevoit la vĂ©ritĂ© mais est trop enlisĂ©e dans l'illusion pour la retenir. Ătape 3 L'Ăąme reconnaĂźt sa propre servitude et essaie de se libĂ©rer, mais elle est toujours liĂ©e aux attachements et Ă l'illusion et retombe au stade 1. Ătape 4 L'Ăąme, ayant reconnu sa servitude, aspire Ă se libĂ©rer Ă nouveau mais refoule, plutĂŽt qu'Ă©liminer, ses attachements et reste donc liĂ©e. Ătape 5 L'Ăąme a un Ă©clair d'illumination et comprend qu'elle doit prendre les Cinq VĆux et y adhĂ©rer afin de se libĂ©rer de la servitude. Ătape 6 L'Ăąme est capable de restreindre ses attachements et ses passions dans une certaine mesure grĂące Ă la discipline des Cinq VĆux. Ătape 7 L'Ăąme surmonte la lĂ©thargie spirituelle et est renforcĂ©e par la mĂ©ditation et l'observance des Cinq VĆux. La conscience de soi grandit de mĂȘme que se dĂ©veloppe une vision plus large de la nature de l'Ăąme elle-mĂȘme et de la rĂ©alitĂ©. Ătape 8 Le karma blessant est abandonnĂ©, la maĂźtrise de soi est perfectionnĂ©e, et une comprĂ©hension plus profonde est obtenue. Ătape 9 Plus de dette karmique est Ă©liminĂ© Ă travers une vie consciente, et une plus grande comprĂ©hension spirituelle est atteinte. Ătape 10 Ă ce stade, on a Ă©liminĂ© presque complĂštement les attachements, mais on est toujours attachĂ© au concept de son corps en tant que soi-mĂȘme. Ceci est perçu comme "aviditĂ© pour un corps", qu'il faut surmonter pour progresser. Ătape 11 Ici, on travaille Ă Ă©liminer l'identification de soi avec le corps et Ă libĂ©rer tous les autres attachements. On reconnaĂźt la nature transitoire des personnes et objets auxquels on est attachĂ© et on les libĂšre. Ătape 12 Toutes les passions productrices de karma ont Ă©tĂ© Ă©liminĂ©es Ă ce stade, y compris l'attachement au corps. Ătape 13 Prenant pleinement conscience de la nature de la rĂ©alitĂ© et de l'Ăąme, on s'engage dans une mĂ©ditation profonde pour se retirer de toute activitĂ© qui pourrait entraĂźner des passions productrices de karma et revenir Ă un stade antĂ©rieur. Ătape 14 Ă l'approche de la mort, on est libĂ©rĂ© de toute dette karmique et on expĂ©rimente la libĂ©ration du moksha, la comprĂ©hension complĂšte, la sagesse et une libĂ©ration totale de la servitude de l'Ăąme individuelle. L'Ăąme est libĂ©rĂ©e et ne sera plus jamais incarnĂ©e sur le plan terrestre pour vivre la souffrance et la mort. Pour certaines personnes, comme les tirthankaras, le stade 14 est atteint bien avant la mort quand ils atteignent le nirvana, la libĂ©ration et ils sont reconnus ConquĂ©rants Spirituels ils se sont complĂštement maĂźtrisĂ©s et des "bĂątisseurs de guĂ©" qui apprennent ensuite aux autres comment faire comme ils ont fait. La clĂ© de cette maĂźtrise est la combinaison de la foi, de la connaissance et de l'action connue sous le nom de Ratnatraya ou Trois Joyaux la Foi Juste la Connaissance Juste la Conduite Juste La Foi Juste, bien sĂ»r, est la croyance en la validitĂ© de la vision JaĂŻn; la Connaissance Juste est la comprĂ©hension de la vĂ©ritable nature de l'Ăąme et de la rĂ©alitĂ©; la Conduite Juste agit fidĂšlement sur les deux premiers. Ceci inclut un respect pour tous les ĂȘtres vivants et le monde naturel, qui inspire le vĂ©gĂ©tarisme jaĂŻn. Les JaĂŻns, les moines en particulier, balaient doucement le chemin devant eux afin de ne pas marcher par inadvertance sur un insecte et portent des masques faciaux pour s'empĂȘcher d'en inhaler, afin que mĂȘme les plus petits ĂȘtres vivants ne soient pas blessĂ©s. Un profond respect de la nature et de la vie de tous les ĂȘtres et formes animĂ©es et inanimĂ©es de la vie fait partie intĂ©grante de la vision JaĂŻn. Symbole JaĂŻn Cette vision est illustrĂ©e par le symbole JaĂŻn, image en forme d'urne avec un point en haut, trois en dessous, la croix gammĂ©e et le hamsa paume de la main levĂ©e avec le mandala au centre et l'inscription. Ce symbole n'est pas ancien, il a Ă©tĂ© créé en 1974 EC, Ă l'occasion du 2 500Ăšme anniversaire du nirvana de Mahavira, pour reprĂ©senter la plĂ©nitude du systĂšme de croyance JaĂŻn. Symbole JaĂŻnPierre Doyen CC BY-NC-ND L'image en forme d'urne reprĂ©sente l'univers, le point en haut symbolise la libĂ©ration de la servitude, les trois points en dessous reprĂ©sentent les Trois Joyaux, la croix gammĂ©e - symbole ancien de transformation avant son appropriation par le parti nazi allemand au 20Ăšme siĂšcle EC - symbolise les quatre Ă©tats d'existence les esprits cĂ©lestes, les humains, les esprits dĂ©moniaques et les esprits infra-humains tels que les plantes et les insectes, tous sur la roue du samsara. La croix gammĂ©e a Ă©tĂ© interprĂ©tĂ©e pour reprĂ©senter le vĂ©ritable caractĂšre de l'Ăąme Ă©nergie sans limite, bonheur sans limite, connaissance sans limite et perception et perspicacitĂ© sans limite. L'image hamsa symbolise le courage et l'engagement dans la non-violence. Le mandala suggĂšre le samsara. L'inscription dans la paume de la main se lit comme "Les Ăąmes se rendent service les unes les autres" ou "La vie est unie par le soutien mutuel et l'interdĂ©pendance", du fait que les JaĂŻns croient que tout de la vie est sacrĂ© et que chaque aspect du monde naturel mĂ©rite le plus grand respect, amour et soin. Conclusion La tradition JaĂŻn soutient que Chandragupta Maurya Ă©tait devenu disciple du sage Bhadrabahu vers 367-298 AEC, qui Ă©tait le dernier moine Ă conserver une connaissance orale complĂšte des textes avant qu'ils ne soient Ă©crits. Chandragupta patronna le JaĂŻnisme en l'honneur de Bhadrabahu et aida Ă Ă©tablir la religion tout comme son petit-fils, Ashoka le Grand rĂšgne 268-232 AEC, devait le faire pour le Bouddhisme. Plus tard, les monarques hindous soutinrent le JaĂŻnisme en commandant la construction de temples. Siddhartha Gautama, le Bouddha vers 563-483 AEC, jeune contemporain de Mahavira, pratiqua l'ascĂ©tisme jaĂŻn avant d'atteindre l'illumination et de former son propre systĂšme de croyance. Entre les 12Ăšme et 16Ăšme siĂšcles EC, les JaĂŻns ont Ă©tĂ© persĂ©cutĂ©s par les envahisseurs musulmans qui dĂ©truisirent leurs temples ou les transformĂšrent en mosquĂ©es et assassinĂšrent des moines. MĂȘme la valeur de longue date de la non-violence jaĂŻn a pu ĂȘtre suspendue dans les cas oĂč l'on devait se dĂ©fendre, dĂ©fendre sa famille ou un site sacrĂ© contre les attaques musulmanes. Au 19Ăšme siĂšcle EC, les missionnaires britanniques ont interprĂ©tĂ© le JaĂŻnisme comme une secte de l'Hindouisme ce qui a donnĂ© lieu Ă l'affirmation, encore rĂ©pĂ©tĂ©e aujourd'hui, selon laquelle le JaĂŻnisme s'est dĂ©veloppĂ© Ă partir de l'Hindouisme et ont tentĂ© de convertir les JaĂŻns avec le reste de la population sans grand succĂšs. Le JaĂŻnisme a survĂ©cu Ă ces deux tentatives d'Ă©radication et a continuĂ© Ă prospĂ©rer en Inde, se propageant finalement Ă d'autres nations dans le monde entier. Bien que la plupart des JaĂŻns rĂ©sident toujours en Inde, il y a environ 5 millions d'adeptes dans le monde, de l'Australie Ă l'Europe, au Japon et aux Ătats-Unis. La plupart des fameux temples jaĂŻns se trouvent encore en Inde comme le temple de Ranakpur ou le temple Dilwara au Rajasthan, le grand temple Gomateshwara au Karnataka - qui abrite la plus grande statue monolithique du monde - ou le temple Hanumantal Ă Jabalpur, oĂč la cĂ©lĂ©bration de lâanniversaire de Mahavira a lieu chaque annĂ©e. Les JaĂŻns honorent les tirthankaras ou acharya l'un des cinq devas suprĂȘmes et, incarnĂ©, le fondateur d'un ordre monastique lors de cultes rĂ©guliers et s'encouragent mutuellement dans la foi. De nombreux temples en Inde sont des lieux de pĂšlerinage fameux pour les JaĂŻns en raison de leurs diverses associations, mais des temples ailleurs dans le monde remplissent Ă©galement une fonction importante. Le JaĂŻn Center of America, dans le Queens, NY, abrite les temples Mahavir et Adinath et est un lieu de culte pour la communautĂ© jaĂŻn locale. Ă travers ces sites et d'autres, le JaĂŻnisme poursuit sa vision de la non-violence, de l'autodiscipline et du respect de tous les ĂȘtres vivants d'aujourd'hui comme dans les temps anciens.
Lacroyance, comme la foi, est un des acte d'adhĂ©sion de l'esprit Ă certaines propositions.Les deux termes sont Ă peu prĂšs synonymes. La foi, cependant, dans le langage ordinaire, relĂšve du religieux, comme dans le Christianisme (Foi religieuse), alors que la croyance, mĂȘme si elle peut Ă©galement ĂȘtre de cet ordre (avec, dans ce cas, sinon une connotation pĂ©jorative, du moins l
L'inconscient peut-il ĂȘtre objet de science ? Lors d'un procĂšs criminel, il est de rĂšgle de faire appel Ă des experts pour dĂ©terminer le degrĂ© de responsabilitĂ© de l'accusĂ©. Ce dernier en effet est sensĂ© avoir agit librement, en toute connaissance de cause dans le cas contraire, s'il s'avĂ©rait que son inconscient, cette zone d'ombre dont le psychisme humain semble affligĂ©, soit Ă l'origine de ses actions, alors sa responsabilitĂ© ne pourrait ĂȘtre engagĂ©. C'est accorder un Ă©norme pouvoir aux experts, pouvoir fondĂ© sur leur savoir ils disposeraient aujourd'hui de connaissances scientifiques suffisantes sur l'inconscient pour pouvoir se prononcer avec une marge d'erreur faible. Cependant nombreux sont les cas oĂč les experts ne sont pas d'accord, oĂč leurs analyses sont dĂ©menties l'opinion commune en vient Ă douter que l'inconscient puisse ĂȘtre objet de science ... Ce que l'on nomme aujourd'hui inconscient, en suivant en gĂ©nĂ©ral l'usage freudien, correspond Ă cette sĂ©rie de phĂ©nomĂšnes peu clairs que tout un chacun constate dans son psychisme Ă cotĂ© de phĂ©nomĂšnes conscients et logiques, nous Ă©prouvons des colĂšres, des peurs inexpliquĂ©es, des sentiments dont nous constatons la prĂ©sence et dont nous ne connaissons ni les tenants ni les aboutissant. Ce moi en moi qui n'est pas moi constitue une prĂ©sence inquiĂ©tante la tentation est grande de demander Ă ce type de connaissance spĂ©cifique qu'est la science, fondĂ©e sur la mĂ©thode expĂ©rimentale, et qui dans de si nombreux domaines a donnĂ© des rĂ©sultats probants, d'investir l'objet inconscient pour en dĂ©couvrir les lois de fonctionnement. En cours de philosophie, cependant, la question reste posĂ©e cet objet, l'inconscient, est-il susceptible d'une investigation scientifique, ou bien est-il par nature d'une essence telle que la science demeure face Ă lui impuissante et qu'il faille alors, si cela est possible, envisager un autre mode de connaissance que l'approche scientifique ? C'est ce que nous examinerons en envisageant dans un premier temps l'approche psychanalytique de l'inconscient, puis, devant les difficultĂ©s rencontrĂ©es, les rĂ©sultats qu'obtiennent des sciences plus classiques comme la biologie, la neurologie, l'Ă©thologie. Enfin nous nous demanderons si l'inconscient ne comporte pas des caractĂ©ristiques qui font que l'approche scientifique, trop rĂ©ductrice, ne saurait ĂȘtre suffisante. I. Oui, inconscient dynamique, Freud A. La thĂšse 1 Expo freudisme inconscient objet de mĂ©thode expĂ©rimentale travail de Freud 2 arg. 1 les mĂ©canismes des deux topiques expliquent le cas des patients; la validitĂ© des thĂ©ories est Ă©prouvĂ©e au cours de la thĂ©rapeutique 3 arg 2 cette science psychologique s'avĂšre prĂ©cieuse =confirmation quand on dĂ©passe simple individu. Par sublimation je rends compte des phĂ©nomĂšnes artistiques, religieux, politique etc. ; 4 arg 3 ce n'est pas de la philo les incohĂ©rences reprochĂ©es montre bien qu'on est dans une science qui se coltine avec le rĂ©el expĂ©rimental tel qu'il est dans l'observation et pas tel que la conscience s'attend Ă le trouver. B / rĂ©futation 1 rĂ©sultat efficacitĂ© n'est jamais preuve. Une erreur peut avoir de bons rĂ©sultats. Et d'ailleurs, est-ce qu'il y a des rĂ©sultats chez Freud? 2 En quoi l'hypothĂšse chez Freud est scientifique? Suit pas la falsifiabilitĂ©, les mĂ©canismes ne sont pas des purs mĂ©canismes, il y a de la cause finale. 3 curieux arg 3 c'est pas parce que c'est de la mauvaise philo que c'est de la bonne science. Voyons la bonne science Les meilleurs professeurs de Philosophie disponibles4,9 17 avis 1er cours offert !5 152 avis 1er cours offert !5 77 avis 1er cours offert !5 63 avis 1er cours offert !5 24 avis 1er cours offert !5 15 avis 1er cours offert !5 14 avis 1er cours offert !5 20 avis 1er cours offert !4,9 17 avis 1er cours offert !5 152 avis 1er cours offert !5 77 avis 1er cours offert !5 63 avis 1er cours offert !5 24 avis 1er cours offert !5 15 avis 1er cours offert !5 14 avis 1er cours offert !5 20 avis 1er cours offert !C'est partiII oui, inconscient non freudien.. au sens de la biologie. Alla thĂšse 1 Expo progrĂšs science depuis Freud la biologie, Ă©thologie, neurologie, science cognitive. On est plus prĂ©cis, on est rentrĂ© dans le mĂ©canisme de la bĂȘte ». 2 arg 1 c'est bien de la science, c'est matĂ©rialiste passage par les instincts et l'animal. 3 arg 2 c'est matĂ©rialiste, chimie du cerveau, substance mĂ©dicamenteuse qui agissent. 4 arg 3 c'est objectif, pur mĂ©canisme, d'ailleurs quantifiable, expĂ©rimentable, pas cause finale. B/ rĂ©futation 1 arg 3 cause finale, cause efficiente si diffĂ©rent? Logiquement toute description en cause finale peut ĂȘtre transposĂ©e en description en cause efficiente changement flĂšche du temps Mais ce n'est pas pour cela que l'on connaĂźt le fond de la rĂ©alitĂ©. 2 arg 1/ 2 c'est bien matĂ©rialiste, mais sont-ce encore des pensĂ©es, n'a-t-on pas jetĂ© le bĂ©bĂ© avec l'eau du bain? La conscience aussi est devenue mĂ©canisme ». Et quid de la spĂ©cificitĂ© de la pensĂ©e? III Non. l'inconscient. ca pense. il s'agit des passions 1 Expo la passion, le phĂ©nomĂšne inconscient est du cotĂ© de la pensĂ©e. Dualisme Ăąme/corps type Descartes. Science = corps. PensĂ©e = philo. Et inconscient» bien du cĂŽtĂ© pensĂ©e. 2 arg 1 passion objet d'une prise de conscience cela implique maĂźtrise, mĂȘme relative, et libertĂ©, pas approchable par la science. 3 arg 2 science mesure effet sur le corps. Mais le corps n'est intĂ©ressant que si effet sur l'Ăąme, sinon l'Ăąme bouge pas. Donc science utile pour expliquer mĂ©canisme corps mais s'arrĂȘte ensuite, et faut faire un traitĂ© des passions. 4 arg 3 phĂ©nomĂšne interprĂ©table seulement en terme de finalitĂ©, sinon ça n'a plus de sens. C'est au fond ce qu'Ă bien compris Freud on ne peut pas faire de la science classique ». Bref, faut faire de la philo et de la bonne, ce serait mieux. Conclusion rĂ©sumĂ© solution + mise en garde du danger Ă demander tout Ă la science. Comme la plus belle fille du monde, elle ne peut donner que ce qu'elle a.
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1 Lâobjectif de cet article nâest pas de donner une dĂ©finition qui distinguerait sans ambiguĂŻtĂ© ce que sont des Ă©motions de ce qui nâen sont pas. Le terme ne le permet pas. Ămotion » et autres mots semblables nâont pas Ă©tĂ© créés avec un objectif si prĂ©cis. Ils existent pour dĂ©signer des phĂ©nomĂšnes comportementaux et expĂ©rientiels qui sortent de lâordinaire. Le mouvement de lâesprit, parfois considĂ©rable, est caractĂ©ristique de ces phĂ©nomĂšnes. Les Romains disaient motus ou motus animi, mouvement de lâĂąme. Une autre particularitĂ© tient au fait que ces mouvements de lâĂąme sont souvent dĂ©clenchĂ©s par des Ă©vĂ©nements ou des objets qui affectent lâĂąme sans que la personne en question les ait recherchĂ©s. Ils ne sont pas directement soumis Ă la volontĂ© ; ils sâimposent des impulsions, des actions, des pensĂ©es, des sentiments. Le Latin les dĂ©signait par affectio â dont les mots français affection » et affectif » sont issus. Outre le mouvement de lâesprit, ces phĂ©nomĂšnes comprennent aussi lâapparition de mouvements et de rĂ©actions corporelles â comme la respiration, les battements du cĆur, les cris et les soupirs â rĂ©actions qui ne sont pas provoquĂ©es par la chaleur, lâeffort physique, ou lâingurgitation excessive dâalcool ⊠Ces derniĂšres caractĂ©ristiques ont conduit Descartes Ă recourir au terme Ă©motion, un mot courant de la langue française de son Ă©poque signifiant Ă©meute » ou agitation ». Aristote pointait la mĂȘme caractĂ©ristique dans son emploi du mot kinĂšsis. Enfin, ces phĂ©nomĂšnes extra » ordinaires se caractĂ©risent par la force, inhabituelle, de leurs actions et leur persĂ©vĂ©rance face aux obstacles, aux interruptions, aux protestations dâautrui voire de soi-mĂȘme lâon dit ou lâon fait des choses dont on sait au mĂȘme moment quâil ne faut pas les dire ou les faire. Câest ce qui fait penser que lâagent est poussĂ© Ă faire ce quâil fait et quâil nâest plus maĂźtre de lui. Les actions, ou les raisons dâagir, paraissent avoir pris une prĂ©sĂ©ance dans lâorganisation du comportement, du ressenti et de la pensĂ©e. Câest Ă cela que renvoient les mots pathĂȘ en Grec, et passion dans dâautres langues ces phĂ©nomĂšnes suggĂšrent la passivitĂ© face aux affections et ont conduit certains philosophes, dont Kant au XVIIIe, Ă interprĂ©ter ce que nous appelons Ă©motions comme des Ă©tats de folie passagĂšre. Autrement dit, Ă©motion » nâest pas une catĂ©gorie solide. Ni ne le sont, du reste, les catĂ©gories Ă©motionnelles diffĂ©renciĂ©es par les noms de colĂšre, joie, peur, ou angoisse ⊠Comme le soulignent les travaux de Wierzbicka 1999, les catĂ©gories recouvrent des significations plus ou moins diffĂ©rentes selon les langues. Ainsi, sadness en anglais nâest pas lâexact synonyme du mot français tristesse ». 2 Ce que ces phĂ©nomĂšnes dĂ©signent, en revanche, câest lâopĂ©ration dâun ensemble de modalitĂ©s psychologiques fondamentales qui dĂ©terminent et guident les interactions de tout organisme avec son entourage. La notion dâ Ă©motion » sert Ă indiquer des rĂ©ponses complexes ou multi-componentielles » Scherer, 1984, câest-Ă -dire composĂ©es de plusieurs rĂ©ponses, quâelles soient physiologiques, motrices, cognitives, affectives et/ou ressenties syndrome multi-componentiel ». Chacune de ces rĂ©ponses, suscitĂ©e par les stimuli et exigences de la situation du moment, rĂ©sulte de lâinteraction de ces modalitĂ©s de base. Chaque Ă©motion reprĂ©sente ainsi un pattern de rĂ©ponses diffĂ©rent. Câest le point de vue avancĂ© par des auteurs comme Scherer 1994, Frijda 2007 et Coan 2010. La vraie nature des Ă©motions rĂ©side dans les modalitĂ©s fondamentales et leurs interactions, plutĂŽt que dans un nombre restreint de patrons spĂ©cifiques. Cette derniĂšre perspective correspond Ă lâidĂ©e centrale de la thĂ©orie des Ă©motions de base » au nombre de sept â joie, tristesse, peur, colĂšre, surprise, dĂ©goĂ»t, mĂ©pris comme lâont proposĂ© les approches dominantes durant le vingtiĂšme siĂšcle, les thĂ©ories dâEkman 1982, Izard 1977, Plutchik 1980 et Tomkins 1984. Pour ces derniĂšres, chaque Ă©motion de base est lâexemplaire dâun nombre restreint de patrons spĂ©cifiques innĂ©s. Pour les thĂ©ories multi-componentielles, en revanche, les Ă©motions relĂšvent de modalitĂ©s de base qui opĂšrent selon une sĂ©quence fonctionnelle. 3 Lâobjectif de cet article est de proposer une conception relationnelle de lâĂ©motion. Ainsi, dans un premier temps, les modalitĂ©s de base constituant lâĂ©motion sont exposĂ©es, suivies, dans un deuxiĂšme temps, de la sĂ©quence fonctionnelle de lâĂ©motion. Cette sĂ©quence est prĂ©sentĂ©e sous lâĂ©clairage thĂ©orique dâun modĂšle perceptif des Ă©motions rendant compte des processus qui rĂ©gissent lâinteraction des modalitĂ©s de base. Ce modĂšle perceptif articule des arguments issus de la perspective Ă©cologique gibsonienne, de la psychologie de la Gestalt et des travaux plus rĂ©cents sur la cognition incarnĂ©e. Enfin, dans un troisiĂšme et dernier temps, les manifestations de lâĂ©motion sont convoquĂ©es en soutien de cette approche relationnelle. 1. â Les modalitĂ©s constitutives de lâĂ©motion 4 La perspective multi-componentielle stipule que lâĂ©motion relĂšve dâune sĂ©quence fonctionnelle impliquant lâinteraction de plusieurs modalitĂ©s. Les Ă©motions sont en premier lieu le produit conjoint de deux modalitĂ©s dĂ©terminantes lâĂ©valuation et les intĂ©rĂȘts ». LâĂ©valuation affective et cognitive dâun objet ou Ă©vĂ©nement en dĂ©termine sa pertinence vis-Ă -vis dâun ou plusieurs intĂ©rĂȘts du sujet. Les Ă©motions se caractĂ©risent Ă©galement par la prĂ©sĂ©ance des rĂ©ponses Ă lâĂ©vĂ©nement â modalitĂ© qui traduit leur prĂ©valence sur les conduites en cours â et par la production dâune attitude prĂ©paratoire sous la forme dâune disposition Ă lâaction » qui pousse le sujet Ă modifier sa relation Ă lâobjet ou lâĂ©vĂ©nement. Cette modalitĂ©, enfin, favorise la sĂ©lection dâactions impulsives qui permettent lâissue visĂ©e par la disposition Ă lâaction. Les points suivants dĂ©taillent ces modalitĂ©s lâune aprĂšs lâautre. â Ăvaluation 5 Les Ă©motions sont, en quelque sorte, des dĂ©tecteurs de pertinence » Scherer, 2005. Les thĂ©ories multi-componentielles partent du principe que la pertinence dâun objet ou dâun Ă©vĂ©nement est dĂ©terminĂ©e par un processus complexe dâĂ©valuation appraisal, en anglais, extrĂȘmement rapide de lâordre de 100 msec ; Grandjean & Scherer, 2009 qui relĂšve de plusieurs niveaux de traitement. Ceux-ci vont dâun niveau de traitement automatique et implicite Ă un niveau de traitement conceptuel conscientisĂ©. Ainsi, ces processus dâĂ©valuation transforment les Ă©vĂ©nements rencontrĂ©s â Ă©vĂ©nements bruts affectant les sens et le corps â en Ă©vĂ©nements pourvus, dâune part, dâune signification pour le sujet, signification en fonction de ses intĂ©rĂȘts cf. ci-aprĂšs â et dâautre part, dâune valeur affective Ă©vĂ©nement agrĂ©able ou attrayant, dĂ©sagrĂ©able ou repoussant, ou indiffĂ©rent, le cas Ă©chĂ©ant. 6 En principe, ces processus dâĂ©valuation se poursuivent automatiquement, et lâinformation qui prend part Ă ces processus reste le plus souvent inconsciente. Il arrive parfois quâelle soit manifeste, comme lorsquâelle facilite la suite du traitement dâinformation. Câest ce qui ressort des expĂ©rimentations utilisant lâamorçage, qui montrent lâinfluence de stimuli prĂ©sentĂ©s trop faiblement pour ĂȘtre perçus consciemment par exemple par backward masking sur les pensĂ©es ou perceptions qui succĂšdent Zajonc, 1984 ; Bargh, 1997. â IntĂ©rĂȘts 7 LâĂ©valuation de la pertinence dâun Ă©vĂ©nement vis-Ă -vis des intĂ©rĂȘts du sujet constitue lâaspect probablement le plus central de lâĂ©motion Frijda, 2007. Chaque Ă©vĂ©nement peut avoir des rĂ©percussions pour la satisfaction ou lâentrave de quelque intĂ©rĂȘt. LâĂ©valuation de cette pertinence est automatique. Sans pertinence vis-Ă -vis dâun intĂ©rĂȘt, il nây aura pas dâĂ©motion, câest-Ă -dire quâaucun des composants qui forment une rĂ©ponse multi-componentielle ne sera activĂ©. Ainsi, la signification de lâĂ©vĂ©nement est directement liĂ©e aux intĂ©rĂȘts. Un intĂ©rĂȘt reprĂ©sente une sensibilitĂ© pour une classe dâobjets, problĂšmes, Ă©vĂ©nements, conceptions de soi-mĂȘme ou du monde cf. le modĂšle cybernĂ©tique de Carver & Scheier, 1990. Si un Ă©vĂ©nement relĂšve dâune telle sensibilitĂ©, il Ă©voque de lâappĂ©tence, attire lâattention, comme quand on entend son nom mentionnĂ© dans une conversation qui se tient Ă cĂŽtĂ©. La pertinence vis-Ă -vis dâun ou plusieurs intĂ©rĂȘts est la condition sine qua non pour lâĂ©mergence dâune Ă©motion. Les Ă©motions ont donc deux conditions dâĂ©mergence lâoccurrence dâun Ă©vĂ©nement et lâexistence dâun intĂ©rĂȘt vis-Ă -vis duquel lâĂ©vĂ©nement est pertinent, câest-Ă -dire dont la satisfaction ou lâentrave pourrait ĂȘtre affectĂ©e par lâĂ©vĂ©nement. 8 Les intĂ©rĂȘts sont des variables latentes, silencieuses. Ce nâest que lorsquâun Ă©vĂ©nement excite la sensibilitĂ©, faisant surgir lâĂ©motion, que lâintĂ©rĂȘt se dĂ©voile. La notion dâintĂ©rĂȘt inclut des sortes dâintĂ©rĂȘts trĂšs diffĂ©rentes des besoins comme les besoins biologiques la faim, la soif, la chaleur corporelle et ceux moins biologiques, comme le besoin dâappartenance Ă un groupe social ; des ressorts, des valeurs, comme les amitiĂ©s et les amours, etc. DĂšs 1938, Murray en avait dressĂ© la liste des plus communs. Bon nombre dâintĂ©rĂȘts se conçoivent comme des valeurs de rĂ©fĂ©rence, telles la faim ou tempĂ©rature Toates, 1986. Les origines des intĂ©rĂȘts sont plurielles. Certains sont clairement des produits de lâĂ©volution. Dâautres proviennent des valeurs ou des orientations socioculturelles Schwartz, 1992. Des recherches comparatives interculturelles montrent ainsi des variations considĂ©rables dans lâimportance des valeurs sociales entre les diffĂ©rentes cultures Schwartz & Boehnke, 2004. Dâautres encore proviennent des expĂ©riences personnelles, comme celles dâattachement. Et dâautres intĂ©rĂȘts encore ont leur source dans les aptitudes cognitives la curiositĂ© en est un exemple et affectives la vue dâun enfant vulnĂ©rable ou des images de lâĂ©vanescence des sentiments ; Tan & Frijda, 1999. La psychologie manque Ă ce jour de thĂ©ories concernant la nature gĂ©nĂ©rale des intĂ©rĂȘts. 9 Les intĂ©rĂȘts concernent ce dont lâindividu cares about, selon lâexpression du philosophe Frankfurt 1988, câest-Ă -dire ce qui tient Ă cĆur ». Les individus, qui en possĂšdent chacun une multitude, diffĂšrent dans leurs intĂ©rĂȘts que ce soit en termes de variabilitĂ© quâen termes de degrĂ© de sensibilitĂ© Gray & McNaughton, 2000. Certains ralentissent Ă chaque oiseau quâils voient, dâautres ne distinguent pas un moineau dâun Ă©tourneau. Cette multitude dâintĂ©rĂȘts explique la variation considĂ©rable des Ă©motions aux niveaux intra-individuel, interindividuel et interculturel. Elle explique Ă©galement un autre fait essentiel des Ă©motions, Ă savoir la pertinence dâun Ă©vĂ©nement particulier vis-Ă -vis de plusieurs intĂ©rĂȘts, qui suscite par consĂ©quent des Ă©motions diffĂ©rentes, voire contradictoires, en mĂȘme temps. La mort dâune personne chĂšre aprĂšs une longue maladie reprĂ©sente une cause de chagrin tout autant que du soulagement. Lâeuthanasie peut Ă©mouvoir Ă la fois comme crime et comme bienfait. On peut se trouver en Ă©tat de conflit entre deux Ă©motions causĂ©es par un mĂȘme Ă©vĂ©nement. â PrĂ©sĂ©ance 10 Comme cela a dĂ©jĂ Ă©tĂ© soulignĂ© en introduction, les Ă©motions se manifestent comme des phĂ©nomĂšnes de prĂ©sĂ©ance en anglais control precedence. Câest ce qui donne aux Ă©motions dâune certaine vigueur le caractĂšre de passions. Ă lâexception de Ribot dans son Essai sur les passions 1907, peu de chercheurs se sont intĂ©ressĂ©s Ă ces phĂ©nomĂšnes de prĂ©sĂ©ance. Les rĂ©ponses dĂ©clenchĂ©es par un Ă©vĂ©nement Ă©valuĂ© comme pertinent vis-Ă -vis dâun intĂ©rĂȘt prennent la prioritĂ© sur les pensĂ©es et les actions en cours. Ribot Ă©voque au sujet des Ă©motions leur impĂ©tuositĂ© irrĂ©sistible » [2]. Elles interfĂšrent avec ce que la personne est en train de faire. Lorsque lâalerte Ă incendie se dĂ©clenche, toute affaire cessante, on court dehors ou restons paralysĂ©s. Elles persistent malgrĂ© lâĂ©ventuelle prĂ©sence dâobstacles, elles font nĂ©gliger les raisons de ne pas agir de la sorte les recommandations de la Raison. Sous lâeffet de la colĂšre on dit des choses dont on sait au mĂȘme instant quâon les regrettera. Le degrĂ© de prĂ©sĂ©ance correspond Ă lâintensitĂ© de lâexpĂ©rience Ă©motionnelle subjective Frijda, 2007. La prĂ©sĂ©ance traduit lâactivation du systĂšme neuronal qui Ă©met la dopamine dans le diencĂ©phale. Ce neurotransmetteur active les Ă©tats de disposition ou prĂ©paration Ă lâaction, en opĂ©rant sur les ganglions de la base Panksepp, 1998 ; Berridge, 2007 ; Robbins & Everitt, 2007. 11 La prĂ©sĂ©ance est une propriĂ©tĂ© de la rĂ©ponse multi-componentielle dans son entier. Elle reprĂ©sente lâengagement de la personne dans ce qui se passe. Lâindividu est engagĂ© tout entier, avec toutes les fonctions qui soutiennent la rĂ©ponse lâattention, lâactivation dâinformations en mĂ©moire, la motivation, la prise de conscience, la mobilisation Ă©nergĂ©tique au niveau de la motricitĂ©, lâactivation physiologique ⊠Tous ces composants sont issus des diffĂ©rents aspects de lâĂ©valuation, et par lâinteraction des diffĂ©rents composants eux-mĂȘmes Scherer, 2009. Ces composants prĂ©sentent une synchronie » Scherer, 2005 ils sâinfluencent et sâaccommodent, pour contribuer ensemble Ă la rĂ©alisation de la modalitĂ© fondamentale suivante un Ă©tat appelĂ© disposition Ă lâaction ». â Lâattitude prĂ©paratoire » la disposition Ă lâaction 12 Si lâĂ©vĂ©nement est Ă©valuĂ© comme Ă©tant pertinent vis-Ă -vis dâun intĂ©rĂȘt, il suscite une Ă©motion. Plus prĂ©cisĂ©ment, il produit une action readiness, câest-Ă -dire une disposition Ă lâaction » ou prĂ©paration Ă lâaction ». Une telle disposition vise la mise en relation ou le changement de la relation â Ă©tablir, renforcer, rompre la relation â entre le sujet et lâĂ©vĂ©nement. La disposition Ă lâaction forme le cĆur de lâĂ©motion maintenir ou modifier la relation actuelle entre le sujet et lâĂ©vĂ©nement afin de produire une situation plus favorable â ou moins dĂ©favorable â aux intĂ©rĂȘts. De telles attitudes [3] comprennent aussi le dĂ©ficit attitudinal, comme dans lâĂ©puisement, ou lâattitude Ă©quivoque, observĂ©e lorsque les circonstances ne permettent aucune action propice, comme dans lâapathie agitĂ©e de lâangoisse. Les dispositions Ă lâaction forment donc la raison dâĂȘtre des Ă©motions. Les prĂ©parations Ă lâaction constituent les prĂ©mices dâactions portant sur la relation entre le sujet et un objet, dĂ©terminĂ©es par lâĂ©valuation. Elles sont la liaison active de deux Ă©tats lâactuel et celui Ă venir. Les dispositions Ă lâaction se comprennent comme inclinant plus que ne rĂ©alisant ; elles dirigent vers un acte et non pas nĂ©cessairement dans lâexĂ©cution de cet acte. Câest pourquoi on peut ressentir un dĂ©sir de fuir sans bouger un muscle. Les dispositions Ă lâaction correspondent souvent davantage Ă des Ă©lans la mobilisation du corps quâĂ la rĂ©alisation dâune action rĂ©elle. On peut Ă©prouver un dĂ©sir dâentrer en contact avec quelquâun sans dire un mot. Ce sont des intentions motrices Burloud, 1938. Bien quâinclinant plus que rĂ©alisant, les Ă©tats de prĂ©paration Ă lâaction consistent en lâĂ©tablissement de rĂ©elles dispositions Ă agir, aboutissant, le cas Ă©chĂ©ant, Ă des vraies actions ou inactions, comme dans lâapathie. Ce ne sont pas seulement des pensĂ©es ou des images mentales. Ils consistent dâabord en des activations neurales qui peuvent durer jusquâau moment oĂč lâaction se dĂ©ploie. Lâexistence de cette prĂ©paration a Ă©tĂ© dĂ©montrĂ©e par les expĂ©riences de Jeannerod 2006 les rĂ©seaux neuronaux actifs lors des mouvements volontaires le sont aussi quand on sâimagine faire ces mouvements. En outre, comme cela a dĂ©jĂ Ă©tĂ© mentionnĂ©, la disposition Ă lâaction activĂ©e par un Ă©vĂ©nement augmente lâĂ©mission de dopamine, qui augmente la prĂ©sĂ©ance. Il y a donc correspondance entre lâĂ©valuation de la pertinence, lâattitude motrice visant Ă modifier ou maintenir la relation, et la forme ou la direction des mouvements qui sâensuivent cf. ci-aprĂšs. 13 Les diffĂ©rentes dispositions Ă lâaction se distinguent par la relation instaurĂ©e ou visĂ©e. La relation visĂ©e renvoie Ă ce que la disposition sâemploiera Ă rĂ©aliser par lâaction. Les diffĂ©rents modes de disposition Ă lâaction cf. permettent de reprĂ©senter les attitudes dont relĂšvent les diffĂ©rentes Ă©motions et ainsi de les dĂ©crire sans avoir recours aux noms dâĂ©motions. La distinction de ces dispositions Ă lâaction est utile car chacune dâelles produit une relation sujetâobjet diffĂ©rente. Les dispositions Ă lâaction participent de lâexpĂ©rience subjective, contribuant Ă la rendre diffĂ©rente dâune Ă©motion Ă lâautre. On peut faire lâhypothĂšse quâun nombre restreint de dispositions Ă lâaction constitue un arsenal dâUr-emotions Frijda & Parrott, 2011. Les Ur-emotions sont des universaux abstraits, identifiables Ă travers les cultures malgrĂ© la variabilitĂ© de leur actualisation et de leur co-occurrence avec dâautres composants du syndrome multi-componentiel que sont les Ă©motions. Ils renvoient aux homologies existant dans les diffĂ©rentes cultures, rendant ainsi inutile le postulat de lâuniversalitĂ© in extenso de ces syndromes multi-componentiels. Ce ne sont pas les Ă©motions dans leur totalitĂ© qui sont basiques et universelles mais plutĂŽt ces Ur-emotions. Tous les Ă©tats Ă©motionnels humains et ceux issus dâun arsenal probablement un peu diffĂ©rent dans dâautres espĂšces animales consistent en lâune ou plusieurs de ces Ur-emotions. Les bases de cet arsenal se trouvent dans les circuits anciens du cerveau, appelĂ©s autrefois le systĂšme limbique et les ganglions de la base, associĂ©s aux neurotransmetteurs correspondants Panksepp, 1998. Tableau Ă lâaction et noms dâĂ©motions Dispositions Ă lâaction et noms dâĂ©motions 14 Le concept de dispositions Ă lâaction trouve son origine dans le fait que, face Ă une situation qui suscite une Ă©motion, on peut observer une variĂ©tĂ© de comportements qui paraissent servir une mĂȘme finalitĂ©. Les diffĂ©rentes actions aboutissent, dans le meilleur des cas, au mĂȘme changement de relation. En colĂšre â câest-Ă -dire en rĂ©ponse Ă une obstruction causĂ©e par un tiers â on peut rĂ©pondre par des coups de poing, par une insulte, ou en endommageant lâun de ses biens, tout autant dâactions qui nuisent Ă lâantagoniste et qui peuvent le motiver Ă mettre fin Ă son entrave. Il y a Ă©quifinalitĂ© » des diverses actions vis-Ă -vis de lâissue visĂ©e. Câest prĂ©cisĂ©ment la diffĂ©rence entre un rĂ©flexe, par exemple la rĂ©action stĂ©rĂ©otypĂ©e du sursaut, et une Ă©motion, dont le patron de rĂ©ponses est variable en fonction des variations circonstancielles du moment [4]. Les modes de disposition Ă lâaction comprennent aussi des modes de manque explicite de prĂ©paration Ă lâaction. Il y a parfois, en effet, absence apparente de prĂ©paration Ă lâaction, comme par exemple dans lâapathie, lâindiffĂ©rence, et le dĂ©sespoir ou lâimpuissance helplessness en anglais. Lâinclination Ă agir existe, mais aucune une action praticable pour rĂ©soudre la situation nâest accessible. Cela est manifeste dans ces situations qui provoquent lâanxiĂ©tĂ©, la panique, la paralysie â mais qui sont profondĂ©ment diffĂ©rentes de celles induisant la peur â ces situations de confrontation Ă un grand danger dont on ignore dâoĂč il surgira un bombardement, un tremblement de terre ou un tsunami. Inversement, beaucoup dâĂ©motions impliquent plusieurs dispositions Ă lâaction du reste, la plupart des rapports verbaux dâĂ©motions en mentionnent plusieurs ; Oatley & Duncan, 1992. Lâenfant sâapproche dâun objet quâil convoite, mais le fait avec rĂ©serve car il se sent observĂ©. Les dispositions Ă lâaction simultanĂ©es peuvent interfĂ©rer les unes avec les autres, sâinhiber, ou se renforcer. On tend Ă se rĂ©frĂ©ner dans une querelle maritale parce que lâhostilitĂ© de la colĂšre rivalise avec lâaffection pour son partenaire ou avec la peur de consĂ©quences dĂ©mesurĂ©es. En face dâune menace, la disposition Ă fuir est contrariĂ©e par la disposition Ă y faire face, voire Ă sâen approcher disposition motivĂ©e par lâintĂ©rĂȘt liĂ© Ă son amour-propre, par exemple. En visant deux issues en mĂȘme temps, les deux intentions se modifient, ou produisent des Ă©tats conflictuels. Ceci est au cĆur de la rĂ©gulation Ă©motionnelle Frijda, 2010, 2012 ; Frijda & Mesquita, 2000, qui nâest pas un moment qui fait suite Ă lâĂ©motion, mais en fait partie intĂ©grante Mesquita & Frijda, 2011. Soulignons que les dispositions Ă lâaction consistent en des structures cognitives » portant sur lâissue Ă atteindre, des attentes sur des actions Ă venir et des cibles. Ces structures cognitives pourraient ĂȘtre mieux spĂ©cifiĂ©es, bien quâavec difficultĂ©, puisque, lors de leur dĂ©roulement, elles sont inaccessibles au codage verbal Jackendoff, 2007. â Actions impulsives 15 Les actions Ă©motionnelles quâappellent les dispositions Ă lâaction visent une issue lâĂ©tablissement, le maintien, ou la modification dâune relation avec lâobjet. Ce ne sont pourtant pas des actions dĂ©libĂ©rĂ©es. Elles ne sont pas guidĂ©es par un but, la reprĂ©sentation prĂ©alable dâune finalitĂ© Ă atteindre. Elles sont impulsives. Dans les distinctions opĂ©rĂ©es dans le temps entre les diffĂ©rents types de comportements, Wundt 1900 considĂ©rait que les actions qui relĂšvent des Ă©motions ne sont ni des rĂ©flexes, ni des habitudes, ni des actions volontaires, mais des Triebhandlungen, ou actions motivĂ©es ; McDougall 1923 les appelait des instincts. Ce sont des actions impulsives, des actions qui ne sont pas prĂ©cĂ©dĂ©es dâun plan ou dâun but, ni initiĂ©es par une intention prĂ©alable. Elles ne sont pas dĂ©libĂ©rĂ©es. Elles ont nĂ©anmoins une direction. Pour cela, elles nâont pas besoin dâun but prĂ©alable parce que la recherche dâune action appropriĂ©e est dĂ©jĂ orientĂ©e vers lâissue. Cette derniĂšre est dĂ©terminĂ©e par lâĂ©valuation de lâĂ©vĂ©nement. Cette issue correspond Ă lâissue comprise dans la disposition Ă lâaction sĂ©lectionnĂ©e, disposition Ă lâaction qui appelle une rĂ©ponse capable dâinstaurer la relation en question. Dans la peur, en face dâune menace, on est confrontĂ© Ă la proximitĂ© dâun danger. En consĂ©quence, on ne cherche pas une sĂ©curitĂ© future dont on peut bien ignorer oĂč elle se situe. On rĂ©pond Ă ce qui est prĂ©sent dans la perception du moment on produit une action de protection contre un danger proche. Dans le dĂ©sir, on ne cherche pas tant Ă sâapprocher de lâobjet quâĂ anĂ©antir la distance qui nous sĂ©pare de lâobjet et qui empĂȘche lâinteraction. Dans lâamour, on suit lâaffordance prĂ©sente dâintimitĂ© plutĂŽt que de se reprĂ©senter les dĂ©lices futurs. Dans la colĂšre, on trouve dans son rĂ©pertoire dâactions une action qui peut neutraliser un saligaud, plutĂŽt que de penser Ă prĂ©server lâordre social. Lâaction impulsive, donc, est contrĂŽlĂ©e non pas par un but prĂ©alable, comme lâaction volontaire, mais par la disposition Ă lâaction ou les dispositions Ă lâaction le cas Ă©chĂ©ant visant Ă faire disparaĂźtre lâobjet Ă©valuĂ© nĂ©gativement, ou Ă obtenir lâobjet dĂ©sirable, ou Ă intensifier lâinteraction avec lui. Selon la signification accordĂ©e Ă lâobjet, la disposition Ă lâaction correspondante est convoquĂ©e. Le seuil de dĂ©clenchement dâune action impulsive est variable. Pour se mettre en colĂšre, il faut parfois une frustration sĂ©vĂšre ; mais parfois un lĂ©ger contretemps suffit. La diffĂ©rence dĂ©pend, entre autres, des Ă©vĂ©nements et des Ă©motions prĂ©existantes, de lâhumeur du moment, câest-Ă -dire dâune activation en deçà du seuil de la disposition de rĂ©ponse. Ces traits convergent vers la notion de prĂ©sĂ©ance, la prĂ©dominance des actions et pensĂ©es suscitĂ©es par lâĂ©motion sur les autres activitĂ©s Frijda, 2003. 16 Les actions impulsives ne sont pas des actions spĂ©ciales. Elles trouvent leur origine, pour la plupart, parmi les actions sociales et instrumentales de la vie courante. Dâautres sont créées pour solutionner un problĂšme dâinteraction spĂ©cifique. La notion dâimpulsivitĂ© sâapplique en fait aux conditions dâapparition de lâaction, appelĂ©e par la disposition Ă lâaction, cette derniĂšre imposant sa prĂ©sĂ©ance. Hormis cette propriĂ©tĂ© de prĂ©sĂ©ance, elles procĂšdent du mĂȘme processus dâapparition que celui de toute action ou pensĂ©e non rĂ©flĂ©chie et intuitive » Kahneman, 2012 ; Rietveld, 2008. La comparaison entre les rĂ©sultats attendus de lâaction et ceux obtenus via le feedback de lâaction guide ce processus. Autrement dit, les actions impulsives rĂ©sultent de la correspondance entre lâinformation cognitive et la prĂ©paration Ă lâaction obtenue lors de lâĂ©valuation, et lâacquisition dâinformation nouvelle de la perception ou la pensĂ©e quand il y a des signaux dâerreur ». Des donnĂ©es montrent que ces comparaisons ont lieu dans le cortex prĂ©frontal et le cortex moteur supplĂ©mentaire Ridderinkhof Forstmann, Wylie, Burle, & van den Wildenberg, 2011. La comprĂ©hension du processus de traitement de lâinformation est aujourdâhui loin dâĂȘtre complĂšte. Toutefois, pour les thĂ©ories de prĂ©diction perceptuelle et cognitive Friston, 2010, 2011 ; Clark, 2012, Ă©laborĂ©es Ă partir des considĂ©rations thĂ©oriques de Helmholtz 1860, toute lâinformation constitue un immense rĂ©seau interconnectĂ© oĂč les excitations se propagent. Ă la suite de la thĂ©orie dâinfĂ©rence inconsciente de Helmholtz, ces nouvelles thĂ©ories postulent que la perception est le rĂ©sultat dâune machine Ă faire des prĂ©dictions ». Chaque perception ou pensĂ©e engendre des prĂ©dictions concernant lâinformation et/ou lâaction Ă venir, la vĂ©rification de ce qui se produit rĂ©ellement, et lâĂ©mission de signaux dâerreurs quand une discordance apparaĂźt. Les Ă©motions suivent vraisemblablement de telles procĂ©dures de traitement dâinformation car rien ne permet de penser quâil existerait des procĂ©dures qui leur seraient spĂ©cifiques. 2. â SĂ©quence fonctionnelle de lâĂ©motion 17 La sĂ©quence fonctionnelle de lâĂ©motion peut ĂȘtre dĂ©crite de la façon suivante les processus dâĂ©valuation transforment les Ă©vĂ©nements rencontrĂ©s en Ă©vĂ©nements pourvus, dâune part, de sens en fonction des intĂ©rĂȘts du sujet et, dâautre part, dâune valeur affective. Les Ă©vĂ©nements sont pourvus de sens en ce quâils requiĂšrent un changement de relation. Les Ă©vĂ©nements qui dĂ©clenchent lâĂ©motion, entravant ou facilitant les intĂ©rĂȘts du sujet, convoquent des actions propres Ă amĂ©liorer la situation. Une attitude motrice, sous la forme dâune disposition Ă lâaction est donc gĂ©nĂ©rĂ©e Ă cette fin. La rĂ©quisition impose la prĂ©sĂ©ance de lâattitude motrice. La disposition Ă lâaction se traduit, le cas Ă©chĂ©ant en action impulsive bien quâelle puisse rester Ă lâĂ©tat de seule disposition. Dans cette sĂ©quence, lâaffordance Gibson, 1979 joue un rĂŽle capital. â Lâaffordance 18 Comme mentionnĂ© auparavant, les processus dâĂ©valuation touchent Ă la signification de lâĂ©vĂ©nement Ellsworth & Scherer, 2003 ce que lâĂ©vĂ©nement peut faire au sujet, peut lui apporter, lui permettre ou non de faire ⊠Gibson 1979 Ă©voque Ă ce sujet le concept dâaffordance cf. Luyat & Regia-Corte, 2009, pour un exposĂ© des rĂ©centes formalisations. Lâaffordance du verbe to afford fournir, offrir la possibilitĂ© est la facultĂ© de lâorganisme Ă se comporter en percevant ce que lâenvironnement lui offre en termes de possibilitĂ©s dâactions. Lâaffordance initie les mouvements et leurs dispositions neuronales comme cela a Ă©tĂ© dĂ©montrĂ© par lâutilization behavior de patients souffrants de certaines perturbations cĂ©rĂ©brales, Lhermitte, 1983. 19 Lâaffordance est une propriĂ©tĂ© de la relation organisme â environnement elle est une opportunitĂ© dâaction Stoffregen, 2003. Elle dĂ©pend donc Ă la fois de lâenvironnement et de lâorganisme considĂ©rĂ© par exemple, lâeau afforde la respiration pour le poisson mais pas pour lâhumain ; le sol afforde la marche pour lâhumain mais pas pour le poisson. De nombreuses affordances ont Ă©tĂ© mises en Ă©vidence expĂ©rimentalement dans les domaines de lâaction motrice et de la locomotion telles que le caractĂšre passable dâune ouverture, le caractĂšre saisissable dâun objet, le caractĂšre franchissable dâun fossĂ©, etc.. Les affordances se traduisent en anglais par le suffixe ability ajoutĂ© au verbe dâaction considĂ©rĂ© ex. climbability dâun escalier la grimpabilitĂ© » dâun escalier. JusquâĂ prĂ©sent, les Ă©tudes ont essentiellement portĂ© sur les affordances neutres » lâescalier, lâouverture, etc.. Or, dans la vie quotidienne, tout sujet navigue dans un environnement qui nâest pas seulement neutre ». La relation organisme â environnement peut parfois sâavĂ©rer potentiellement nocive ou particuliĂšrement propice favorable â notamment la navigation dans le monde social, celui des interactions interpersonnelles. Aussi est-il essentiel de percevoir des objets davantage que leur grimpabilitĂ© » ou leur passabilitĂ© ». Il sâagit de percevoir comment ils constituent un obstacle ou une opportunitĂ©, une menace ou une invitation Ă la caresse ⊠autrement dit, leur valeur affective. Or, prĂ©cisĂ©ment, les processus de traitement dâinformation pourvoient aussi les Ă©vĂ©nements rencontrĂ©s en valeur affective. Les processus dâĂ©valuation doublent simultanĂ©ment la signification de lâĂ©vĂ©nement dâune attitude hĂ©donique Ă son Ă©gard. Anelli, Borghi et Nicoletti 2012 ont, de la sorte, montrĂ© expĂ©rimentalement que des objets prĂ©hensibles mais dangereux nâinvitent pas Ă sâen saisir. Ă caractĂšre saisissable Ă©quivalent, les temps de rĂ©action sont plus lents pour des objets dangereux. Leurs rĂ©sultats Ă©voquent donc lâexistence dâaffordances aversives, ces derniĂšres pouvant ĂȘtre considĂ©rĂ©es comme des affordances affectives » qui se traduisent par une attitude affective dâattraction ou de rĂ©pulsion vis-Ă -vis de lâĂ©vĂ©nement. Des affordances affectives sont aussi observĂ©es par Coello, Bourgeois et Iachini 2012 en matiĂšre dâaccessibilitĂ© dâobjets dangereux et potentiellement menaçants. Lâaffordance affective, propriĂ©tĂ© relationnelle du systĂšme sujetâobjet [5], est lâopportunitĂ© dâaction envers ou lâopportunitĂ© dâaction Ă lâencontre offerte par les objets au sujet. Une personne offensante invite Ă ĂȘtre giflĂ©e ou toute autre forme de riposte, une personne attrayante invite Ă ĂȘtre embrassĂ©e. 20 Câest au cĆur de cette relation sujetâobjet, qui est une relation agissante, que se situe lâĂ©motion. Dans le systĂšme indivisible que constituent lâorganisme le sujet et son environnement cf. Gibson, 1979 [6], le sujet, en constante interaction avec son environnement, est Ă©galement constamment prĂȘt Ă modifier cette interaction ; il est ainsi continuellement dans un Ă©tat de prĂ©paration Ă lâaction Frijda, 1986, 2007. LâĂ©motion surgit quand survient un changement notable dans la relation sujetâobjet organismeâenvironnement. Il y a Ă©motion quand il y a rupture de continuitĂ© » RimĂ©, 2005, câest-Ă -dire une modification soudaine de lâinteraction sujetâobjet en cours, faisant passer la relation dâun Ă©tat Ă un autre lâinteraction est rompue ou intensifiĂ©e ou rĂ©duite, etc. Autrement dit, il y a Ă©motion quand il y a un changement de la prĂ©paration Ă lâaction. Par consĂ©quent, lâĂ©motion est un processus dâextraction par lâaction. Elle partage en cela le mĂȘme trait que la perception. Le conducteur, devant qui surgit un obstacle imprĂ©vu, ne mĂ©dite pas le coup de frein ou le coup de volant qui empĂȘchera la collision. Percevoir lâobstacle comme un danger, câest lâapprĂ©hender comme requĂ©rant une certaine rĂ©ponse ou action un coup de frein, un coup de volant, actionârĂ©ponse qui constitue lâĂ©motion. Câest la fameuse notion dâĂ©meute ou dâagitation de Descartes pour qui lâĂ©motion est un mouvement physique de lâhomme face au monde et de kinĂšsis dâAristote de fait, lâĂ©motion ne serait pas ce quâelle est sans son exhortation Ă lâaction ou exhortation Ă ne pas agir, comme dans lâaccablement. LâĂ©motion incite Ă sâapprocher, ou Ă sâen aller, ou Ă sâinterrompre, etc. La compassion incite Ă apporter de lâaide, la honte incite Ă se cacher, Ă disparaĂźtre de la vue des autres ⊠Or, dans la perspective de la thĂ©orie de Gibson plus rĂ©cemment formalisĂ©e par Stoffregen, 2003, 2004, notamment [7], mouvement et perception sont indissociables car la perception Ă©merge grĂące au mouvement. La perception est une saisie dâinformation information pickup [8] par lâaction. Câest lâaction qui fournit lâinformation [9], lâinformation Ă©tant ce que lâorganisme fait Ă©merger de lâenvironnement par son action et quâil saisit pick up. Pour Gibson, la perception est directe et ne passe pas par une reprĂ©sentation intermĂ©diaire. La perception nâest pas un processus interne dâinterprĂ©tation, câest un processus dâextraction par lâaction. La dimension cinesthĂ©sique est donc centrale dans cette approche. Câest prĂ©cisĂ©ment ici que prennent place les Ă©motions. â La cinesthĂ©sie 21 Emotion et action sont Ă©troitement liĂ©es dans la mesure oĂč lâĂ©motion peut ĂȘtre considĂ©rĂ©e comme relevant de la perception cinesthĂ©sique. La perception ou sensibilitĂ© cinesthĂ©sique est la perception de la position du corps et des mouvements du corps [10]. Elle concerne la sensation de mouvement des diffĂ©rentes parties du corps. La cinesthĂ©sie, formĂ©e de deux racines grecques [11], est ainsi le sens du mouvement, la forme de sensibilitĂ© qui renseigne dâune maniĂšre spĂ©cifique sur la position et les dĂ©placements des diffĂ©rentes parties du corps. Traduite en termes Ă©motionnels, la cinesthĂ©sie se comprend de la façon suivante percevoir lâobstacle comme un danger, câest lâapprĂ©hender comme requĂ©rant une certaine rĂ©ponse â un coup de volant par exemple. Câest cette rĂ©ponse, ou, plus prĂ©cisĂ©ment, sa perception cinesthĂ©sique, qui constitue lâĂ©motion. LâexpĂ©rience subjective du danger, câest lâexpĂ©rience de son corps mobilisĂ© en vue dâune certaine rĂ©ponse une prĂ©paration Ă la fuite, ou Ă la paralysie, ou Ă lâattaque prĂ©ventive. Autrement dit, la phĂ©nomĂ©nologie de la peur est celle de la mobilisation du corps en vue dâune prĂ©paration Ă la fuite ou Ă la paralysie, ou Ă lâattaque prĂ©ventive. LâexpĂ©rience subjective de la tendresse, câest lâexpĂ©rience de son corps mobilisĂ© en vue dâĂ©treindre ou de caresser lâautre. Dans un Ă©pisode de tendresse, nous percevons une personne comme enjoignant une caresse ou une Ă©treinte. Les Ă©motions sont alors conçues comme livrant au sujet un monde chargĂ© de valeurs, sous la forme dâobjets invitant Ă lâaction. 22 Par consĂ©quent, les processus dâĂ©valuation qui, comme on lâa vu plus haut, transforment les Ă©vĂ©nements rencontrĂ©s en Ă©vĂ©nements pourvus Ă la fois dâune signification pour le sujet â en fonction de ses intĂ©rĂȘts â et dâune valeur affective, sont dâune nature particuliĂšre. En effet, la signification de lâobjet ou de lâĂ©vĂ©nement nâest pas une Ă©valuation cognitive entendue comme un acte isolĂ© dâapprĂ©ciation intellectuelle ; câest une forme de comprĂ©hension mĂ©diĂ©e par sa propre mobilisation corporelle. Câest ce que traduit la notion de enactive appraisal Colombetti, 2007 ou Ă©valuation Ă©nactive » [12]. Lâobjet attire ou repousse. Des impulsions poussent » le sujet envers ou Ă lâĂ©cart de lâobjet. Le psychologue gestaltiste Kölher 1929 considĂšre que la valeur de lâobjet est tout aussi immĂ©diatement perçue que ses qualitĂ©s sensibles. Pour lui, la valeur est rĂ©quisition requiredness. Ce que lâobjet requiert comme rĂ©ponse constitue sa valeur ex. la valeur danger. La valeur de lâobjet provient donc de la phĂ©nomĂ©nologie corporelle comme lâaffirment Deonna & Teroni 2012, la mobilisation du corps constitue lâexpĂ©rience de la valeur danger ». Une offense requiert des actions pouvant la juguler ; un Ă©vĂ©nement attrayant requiert une action dâapproche et dâouverture pour bĂ©nĂ©ficier de lâobjet. Aussi la perception est-elle autant un processus moteur quâun processus sensoriel. Du reste, au niveau neuronal, les processus sensoriels et moteurs ont un codage commun Colombetti & Thompson, 2005. En effet, comme lâexplique Northoff 2012, les donnĂ©es de neuro-imagerie indiquent lâexistence dâune activitĂ© neuronale procĂ©dant Ă un codage relationnel convergence intĂ©ro-extĂ©roceptive qui, en couplant corps, cerveau et environnement, permet lâassignation de propriĂ©tĂ©s subjectives et affectives Ă des stimuli qui, autrement, demeurent objectifs et non affectifs. La perception est donc Ă©nactive ; câest un type dâaction, lâaction constituant la perception Colombetti, 2007 ; NoĂ«, 2004 ; Varela, Thompson & Rosch, 1991. Au niveau psychologique, action et perception sont constitutivement enchevĂȘtrĂ©s. Câest ce quâa soulignĂ© Kölher et dâautres psychologues avec lui Rosenthal & Visetti, 1999, 2006 ; Wallon, 1949, p. 66. Dâailleurs, lorsque les mouvements moteurs de lâindividu sont inhibĂ©s, on observe une interfĂ©rence dans lâexpĂ©rience Ă©motionnelle et dans le traitement de lâinformation Ă©motionnelle Niedenthal, 2007. Dans cette perspective, les ressentis Ă©motionnels sont les perceptions de ces dispositions Ă lâaction, câest-Ă -dire les perceptions de lâengagement dynamique du corps sa prĂ©paration Ă lâaction dans lâinteraction avec lâobjet. Plus prĂ©cisĂ©ment, lâexpĂ©rience phĂ©nomĂ©nologique dâune Ă©motion est la perception cinesthĂ©sique, la perception de son corps mobilisĂ© en vue de modifier, dâune certaine façon, la relation sujetâobjet, la perception de la mobilisation du corps en vue dâune certaine action vis-Ă -vis de lâobjet. Ainsi, cette sĂ©quence Ă©motionnelle permet de rendre compte de lâessence de ces phĂ©nomĂšnes appelĂ©s Ă©motions » leur intentionnalitĂ© et leur expĂ©rience phĂ©nomĂ©nale. Ces deux aspects sont dĂ©veloppĂ©s ci-dessous. â IntentionnalitĂ© Ă©valuative 23 Les Ă©motions sont intentionnelles, câest-Ă -dire quâelles sont toujours Ă propos de quelque chose » ; elles possĂšdent nĂ©cessairement un objet [13]. Elles sont dĂ©clenchĂ©es par un Ă©vĂ©nement, une situation, une personne, un souvenir tel enfant a peur du noir, tel autre est fier de son tricycle. Il sâagit, plus prĂ©cisĂ©ment, dâune intentionnalitĂ© Ă©valuative Deonna et Teroni, 2008. Si lâenfant est fier de son tricycle, câest quâil a une certaine croyance Ă propos de son tricycle quâil est le plus beau des tricycles. Les croyances impliquĂ©es dans les Ă©motions sont dâun certain type en ce sens quâelles relĂšvent de valeurs axiologiques. Pour les philosophes Döring, 2009 ; Goldie, 2009, ces valeurs axiologiques ne sont pas des valeurs abstraites ou des idĂ©aux vers lesquels tend lâindividu. Il sâagit dâun type particulier de propriĂ©tĂ©s que lâobjet exemplifie. Ces valeurs sont conçues comme des qualitĂ©s formelles des propriĂ©tĂ©s Ă©valuatives de lâobjet qui suscite lâĂ©motion. Autrement dit, certains objets illustrent â ou exemplifient â certaines valeurs. Etre jaloux dâune tierce personne câest croire quâelle est un rival la tierce personne exemplifie la valeur rivalitĂ© », ĂȘtre dĂ©goĂ»tĂ© Ă la vue dâun plat dâĂ©pinards, câest croire quâil est immonde le plat dâĂ©pinards exemplifie la valeur immondice ». Ces valeurs sont directement liĂ©es aux intĂ©rĂȘts de la personne ; câest pourquoi le mĂȘme malheur affectera davantage sâil frappe son enfant que sâil sâabat sur lâenfant dâun autre, bien que la valeur en jeu soit identique dans les deux cas. Chaque famille dâĂ©motion se distingue ainsi par une valeur particuliĂšre celle de lâoffense pour la colĂšre, celle du danger ou de la menace pour la peur, celle de la perte pour la tristesse et le chagrin, etc. Lazarus 1991 a forgĂ© la notion de core relational theme pour les dĂ©signer. Pour autant, on ne peut pas rĂ©duire les Ă©motions Ă des seules croyances axiologiques. En effet, comme le soulignent Deonna et Teroni 2008, p. 52, une croyance axiologique nâest ni nĂ©cessaire, ni suffisante Ă une Ă©motion ». Ils invoquent plusieurs raisons. PremiĂšrement, la complexitĂ© cognitive dâune attribution axiologique la rend impossible chez les trĂšs jeunes enfants et chez les animaux. Les uns comme les autres ne maĂźtrisent pas les concepts participant de ses croyances des concepts axiologiques tels que celui de danger, de rivalitĂ©, etc.. Pourtant, bien que dĂ©nuĂ©s de tels concepts, il ne fait aucun doute quâils ressentent des Ă©motions. DeuxiĂšmement, il nâest pas rare de ressentir une Ă©motion en lâabsence de la croyance axiologique contingente relative Ă cette Ă©motion on peut ĂȘtre persuadĂ© quâune araignĂ©e nâest pas dangereuse et pourtant en avoir terriblement peur ; on peut ĂȘtre convaincu de nâavoir transgressĂ© aucun impĂ©ratif moral, et ĂȘtre cependant rongĂ© par la culpabilitĂ©. TroisiĂšmement, certaines croyances laissent paradoxalement de marbre fumer tue » mentionne le paquet de cigarette. Oui, le fumeur le croit volontiers. Pourtant, il nâĂ©prouve aucune peur absence dâĂ©motion en prĂ©sence de la croyance axiologique. Enfin, le rapport entre lâĂ©motion et la valeur peut ĂȘtre anormal, comme lorsquâon se rĂ©jouit du malheur dâautrui Dumouchel, 2002. Par consĂ©quent, on ne peut pas considĂ©rer les Ă©motions comme de simples » jugements de valeurs, de simples phĂ©nomĂšnes intellectuels. LâĂ©motion, ou plus exactement la disposition Ă lâaction, apparaĂźt ainsi comme un principe dâextraction spontanĂ© de la valeur. Autrement dit, la nature des processus dâĂ©valuation ne relĂšve pas de jugements cognitifs tels quâentendus, par exemple, par le modĂšle des processus composants Grandjean & Scherer, 2009. La nature de lâĂ©valuation est Ă©nactive. â PhĂ©nomĂ©nologie 24 En sus de son intentionnalitĂ©, lâĂ©motion se caractĂ©rise par sa dimension phĂ©nomĂ©nale. Une Ă©motion est quelque chose que lâon ressent ressentir le vide absolu dans la tristesse, ressentir le besoin impĂ©rieux de disparaĂźtre sous terre dans la honte, se sentir rongĂ© par la convoitise, se sentir excitĂ© et dĂ©bordant dâĂ©nergie, paralysĂ© et incapable de penser rationnellement ⊠Les psychologues parlent Ă ce sujet dâexpĂ©rience subjective. Dans le langage courant du reste, le terme Ă©motion » dĂ©signe en premier lieu cette expĂ©rience subjective je ressens une Ă©motion. La description du contenu » de lâexpĂ©rience subjective est souvent trĂšs ardue. Pour en rendre compte, le recours Ă la dimension corporelle est frĂ©quent avoir des bouffĂ©es de chaleur, sentir sa gorge se nouer, son cĆur battre Ă tout rompre, etc. Ainsi, lâidĂ©e que lâĂ©motion consistait en une perception viscĂ©rale sâest imposĂ©e Ă la suite de la thĂ©orie pĂ©riphĂ©rique de James-Lange. Seulement, comme lâont montrĂ© les psychologues tout au long du XXe siĂšcle, lâĂ©motion ne peut pas ĂȘtre rĂ©duite Ă la seule perception des modifications physiologiques. Tout dâabord, en matiĂšre de sensations corporelles, les diverses Ă©motions sont ressenties trĂšs diffĂ©remment Ă travers les nombreuses cultures. En Belgique, la tristesse se caractĂ©rise par un nĆud dans la gorge et des sensations gastro-intestinales RimĂ©, Philippot, & Cisamolo, 1990 tandis quâen Ăquateur, elle se manifeste par un douloureux mal de tĂȘte et des palpitations cardiaques Le Breton, 1998. Les Français, rĂ©alisant quâils ont commis un impair, sentent leur cĆur sâarrĂȘter de battre et le rouge leur monter au front Lelord et AndrĂ©, 2001 tandis que les Chewong Malaisie expriment leur honte par le fait que leur foie est tout rĂ©trĂ©ci. Quant aux Samoans PolynĂ©sie ou aux Ifaluks MicronĂ©sie, ces peuples ne rapportent aucune sensation corporelle lorsquâils dĂ©crivent une Ă©motion donnĂ©e Mesquita et Frijda, 1992. De plus, au-delĂ du fait que des diffĂ©rences interculturelles existent dans la façon de ressentir physiquement les Ă©motions, les recherches psychophysiologiques sur la viscĂ©roception ont montrĂ© que les sensations corporelles ne pouvaient pas ĂȘtre dĂ©terminĂ©es par des changements physiologiques rĂ©els puisquâon nâa jamais pu Ă©tablir de corrĂ©lation significative entre les sensations corporelles et des changements neurovĂ©gĂ©tatifs objectifs par exemple, le rythme cardiaque mesurĂ© par Ă©lectrocardiogramme ; Edelmann & Baker, 2002. En rĂ©alitĂ©, lâĂȘtre humain est incapable de viscĂ©roception ⊠ce qui signifie que, plutĂŽt que de correspondre Ă des modifications physiques sous-jacentes, les sensations corporelles sont en fait la traduction de reprĂ©sentations cognitives culturelles appelĂ©es schĂšmes psychophysiologiques Philippot, 1997 [14]. Ă ceci sâajoutant que les recherches psychophysiologiques aient Ă©tĂ© incapables dâĂ©tablir des configurations physiologiques spĂ©cifiques de chaque Ă©motion et que la thĂ©orie pĂ©riphĂ©rique sâest trouvĂ©e dans lâincapacitĂ© de rendre compte de la dimension intentionnelle des Ă©motions câĂ©tait la principale objection des thĂ©ories cognitives Ă son Ă©gard, lâidĂ©e selon laquelle lâĂ©motion serait la perception de sensations internes a Ă©tĂ© abandonnĂ©e. 25 LâexpĂ©rience subjective constitue lâun des composants majeurs de lâĂ©motion. Cette expĂ©rience consciente de lâĂ©motion reflĂšte les modalitĂ©s Ă©valuation, intĂ©rĂȘts, prĂ©sĂ©ance ⊠non conscientes sous-jacentes, bien quâelle ne le fasse quâen partie et gĂ©nĂ©ralement Ă lâinsu du sujet. En effet, la plupart de ces modalitĂ©s passent inaperçues comme Bargh 1997 entre autres lâa montrĂ© dans ses travaux. Ou encore, le sujet attribue sa rĂ©ponse par exemple une prĂ©fĂ©rence Ă une modalitĂ© qui en rĂ©alitĂ© nâen est pas responsable. Cette attribution erronĂ©e repose sur des prĂ©conceptions cognitives. Ainsi, dans les expĂ©riences de Nisbett & Wilson 1977 la prĂ©fĂ©rence pour lâun des deux stimuli deux linges identiques sur un prĂ©sentoir nâĂ©tait pas attribuĂ©e Ă sa cause rĂ©elle sa localisation sur le cĂŽtĂ© droit de lâĂ©talage, mais Ă©tait attribuĂ©e Ă dâautres raisons. Ces donnĂ©es conduisent certains auteurs Ă considĂ©rer lâexpĂ©rience subjective de lâĂ©motion comme un Ă©piphĂ©nomĂšne superflu, dont le rĂŽle nâest pas essentiel dans le processus Ă©motionnel LeDoux, 1996. Les raisons pour lesquelles cette vue est dĂ©cidĂ©ment incorrecte sont exposĂ©es ci-aprĂšs. â Les niveaux de conscience dans lâexpĂ©rience subjective 26 LâexpĂ©rience consciente a un rĂŽle important dans les Ă©motions. Tout dâabord, sans expĂ©rience consciente il nây a pas dâaction ou mouvement intentionnel spontanĂ© Dehaene & Naccache, 2001 ; Weiskrantz, 1997. Des patients blindsight, câest-Ă -dire dont la cĂ©citĂ© est due Ă des sections de la rĂ©tine, peuvent discriminer correctement des stimuli parvenant Ă ces sections quand on les invite Ă deviner ce qui pourrait sây trouver. Il en est de mĂȘme quand la cĂ©citĂ© est causĂ©e par interfĂ©rence par backward masking. Les patients peuvent Ă©ventuellement rĂ©pondre correctement quand on leur demande de deviner. NĂ©anmoins, ces directives sont essentielles, car si on ne lui demande pas de deviner, le sujet nâest pas spontanĂ©ment curieux vis-Ă -vis de ce quâil ne voit pas. Voir consciemment et ĂȘtre curieux une capacitĂ© de premiĂšre importance, mĂȘme pour une souris ou un merle ! En deuxiĂšme lieu, lâinspection visuelle par le regard prolonge la durĂ©e de rĂ©ception de lâinformation, la quantitĂ© dâinformation reçue, et lâĂ©tendue des rapports verbaux Ă autrui Baars, 1997. De plus, en prĂ©sence de stimuli agrĂ©ables ou intĂ©ressants, des actions pour augmenter leur rĂ©ception sont produites, comme quand on fait couler le vin autour de sa langue ou que lâon regarde encore et encore une personne attrayante. Ces actions ne sont pas vaines. Ce sont des actions appelĂ©es mouvements dâacceptation » Frijda, 1986. Elles forment ou renforcent un lien affectif et une inclination Ă retourner Ă lâinteraction. Ce phĂ©nomĂšne sâobserve aux niveaux les plus bas des fonctions cognitives, comme lâenfant sans cortex cĂ©rĂ©bral qui sourit en tenant un bĂ©bĂ© dans ses bras Merker, 2007. Ces enrichissements dâinformation dans la mĂ©moire ou le souvenir â et les sentiments donc â trouvent probablement leur base dans la rĂ©currence dâactivitĂ©s neurales dans les mĂȘmes rĂ©seaux de neurones Edelman & Tonino, 2000 ; Lamme, 2006. Enfin, un dernier argument est celui de la recherche des plaisirs et le fait de prendre le temps et lâinitiative de les expĂ©rimenter. Il nây aurait aucune raison dâentreprendre des activitĂ©s qui procurent du plaisir assister Ă des spectacles, faire du sport, sâengager dans des interactions amicales si on nâĂ©prouvait aucun sentiment en les pratiquant ⊠La raison de ces plaisirs provient de la satisfaction des intĂ©rĂȘts concernĂ©s, lesquels sont dĂ©finis par les Ă©tats du sujet ou du monde en question. Lâinverse est vrai pour la douleur. Elle signale lâabsence de satisfaction des intĂ©rĂȘts, ou lâentrave Ă leur satisfaction. Aristote, dans son Ăthique Ă Nicomaque, a prĂ©sentĂ© la raison des sentiments. Son explication reste valable. Les sentiments Ă©lĂ©mentaires â plaisir, douleur, dĂ©sir â forment les moniteurs du fonctionnement du systĂšme animal en gĂ©nĂ©ral, et rĂ©sument le bilan du fonctionnement de toutes les fonctions en cours dâopĂ©ration Frijda, 2007. 27 Le recours au terme consciente » nĂ©cessite quelques prĂ©cisions. LâĂ©motion procĂšde de niveaux de conscience diffĂ©rents Tcherkassof & Mondillon, 2013. Ces niveaux de conscience sont dits anoĂ©tique, noĂ©tique, et autonoĂ©tique Philippot, Douilliez, Baeyens, Francart, & Nef, 2003 [15]. Lorsquâelle relĂšve dâun niveau de conscience anoĂ©tique, lâĂ©motion nâaccĂšde pas Ă la conscience elle est non consciente. Elle est suscitĂ©e par un antĂ©cĂ©dent non conscient, câest-Ă -dire que lâĂ©vĂ©nement qui cause lâĂ©motion est inconscient. LâĂ©motion est bien prĂ©sente car on en observe lâinfluence au plan cognitif au niveau du raisonnement, de la catĂ©gorisation, des infĂ©rences, de la prise de dĂ©cision, etc. ; cf. Damasio, 1995, qui a dĂ©montrĂ© le rĂŽle clĂ© des Ă©motions dans les processus de dĂ©cision ; voir aussi Channouf, 2006, pour une revue. De plus, certains de ses composants sont activĂ©s on observe des manifestations physiologiques ou comportementales, par exemple. Cependant, la personne nâest pas capable de verbaliser sa rĂ©action Ă©motionnelle au moment oĂč elle se produit » et ne rapporte aucune expĂ©rience subjective Ă©motionnelle. Ainsi, lâĂ©valuation dâune boisson par des participants qui indiquent ne rien ressentir de particulier mais qui ont Ă©tĂ© soumis Ă une induction Ă©motionnelle sans quâils en soient conscients Ă©tait congruente avec la valence de lâinduction Winkielman & Berridge, 2004. LâĂ©motion peut aussi relever dâun niveau de conscience dit noĂ©tique, sorte de conscience Ă©motionnelle phĂ©nomĂ©nologique immĂ©diate et non rĂ©flexive Block, 2007. Par exemple, en matiĂšre de perception visuelle, le piĂ©ton, marchant dans la rue tout en Ă©tant absorbĂ© dans une discussion et pourtant esquivant les obstacles arbres, bancs publics, bornes Ă incendie, etc., prouve lâexistence dâune conscience des obstacles. Toutefois, le piĂ©ton nâa pas conscience de ces obstacles, il nâen prend pas conscience et ne les Ă©vite pas sciemment et sera par exemple incapable de rappeler par la suite les obstacles rencontrĂ©s. Ce type de conscience a Ă©tĂ© dĂ©montrĂ© empiriquement par Dehaene, Changeux, Naccache, Sackur et Sergent 2006. Des Ă©tudes en neuro-imagerie leur ont permis de cerner un Ă©tat dâactivitĂ© prĂ©conscient transitoire au cours duquel lâinformation est potentiellement accessible, sans que le sujet y accĂšde consciemment cf. aussi Lamme, 2006. En matiĂšre Ă©motionnelle, ce niveau de conscience constitue la forme la plus commune de lâexpĂ©rience Ă©motionnelle et caractĂ©rise lâexpĂ©rience Ă©motionnelle des jeunes enfants notamment. LâexpĂ©rience subjective apparaĂźt diffuse et inarticulĂ©e. Elle nâest pas verbalisable. Elle sâapparente, par exemple, Ă lâexpĂ©rience directe du goĂ»t du vin, câest-Ă -dire quâelle relĂšve de la seule sensation ou qualia. La personne nâidentifie pas lâĂ©motion qui lâaffecte, tout comme le piĂ©ton nâidentifie pas les obstacles. Elle est immergĂ©e dans son rapport Ă lâobjet ici et maintenant Frijda, 2005. Câest une conscience Ă©motionnelle irrĂ©flĂ©chie dans laquelle la personne et lâobjet de lâĂ©motion sont indissolublement unis Sartre, 1939. Un truisme phĂ©nomĂ©nologique caractĂ©rise ce niveau de conscience le monde ne semble pas comme ci ou comme ça ; il est comme ci ou comme ça â vivre dans un enfer oĂč il nây a aucun moyen de sâĂ©chapper. Dans le bonheur, le monde nâapparaĂźt pas comme sâil Ă©tait rempli de gens bons et beaux ; les gens sont bons et beaux. Ce niveau de conscience favorise la mise en Ćuvre de processus dâattributions afin de donner du sens Ă ce qui est ressenti Schachter & Singer, 1962 ; Weiner, 1986 faisant alors passer lâexpĂ©rience subjective au niveau autonoĂ©tique. La conscience dâĂȘtre le sujet dâune Ă©motion clairement identifiĂ©e rĂ©sulte de processus autonoĂ©tiques ; câest lorsque la personne prend conscience quâelle est dans un Ă©tat Ă©motionnel particulier. Dans ce cas, elle peut verbaliser son Ă©tat Ă©motionnel je suis vraiment trĂšs en colĂšre ». Il sâagit dâune conscience rĂ©flexive dans laquelle lâexpĂ©rience Ă©motionnelle est davantage articulĂ©e lâun des ou plusieurs composants de lâĂ©motion devient lâobjet de rĂ©flexion. La personne prĂȘte attention Ă ses propres Ă©tats et les interprĂšte selon la thĂ©orie naĂŻve des Ă©motions Ă laquelle elle souscrit. Cette thĂ©orie naĂŻve comporte les diffĂ©rents scripts en vigueur dans la culture de la personne et toutes les considĂ©rations de sens commun concernant le rĂŽle des pensĂ©es, des sensations corporelles, des inclinations comportementales, etc., au sujet des Ă©motions. Ainsi, Lambie et Marcel 2002 notent que les expĂ©riences subjectives de peur, dâanxiĂ©tĂ© et de tristesse sont davantage dĂ©crites par les Chinois, comparativement aux AmĂ©ricains blancs de classe moyenne, en termes de sensations corporelles et de concomitants interpersonnels et ne le sont jamais en termes de caractĂ©ristiques intrapsychiques comme des pensĂ©es par exemple. En revanche, les descriptions des Ă©motions que font les Samoans ou les Ifalukiens nâincluent aucune rĂ©fĂ©rence Ă des corrĂ©lats physiologiques Mesquita & Frijda, 1992. 3. â Les manifestations de lâĂ©motion 28 La notion de disposition Ă lâaction devient plus explicite lorsquâon examine les actions occasionnĂ©es par des Ă©vĂ©nements Ă©motionnels, et en particulier en examinant les expressions faciales et corporelles. Pour de nombreux auteurs de lâĂ©cole nĂ©o-darwinienne amĂ©ricaine par exemple Ekman, 1982 ; Tomkins, 1984, lâinterprĂ©tation de ces expressions » est souvent celle dâactions de communication servant Ă informer autrui de son Ă©motion. Mais il est plus appropriĂ© de leur donner une tout autre interprĂ©tation. Il faut considĂ©rer ces mouvements comme des actions, ou parties dâactions, qui servent Ă Ă©tablir ou modifier une relation avec un objet ClaparĂšde, 1928 ; Dewey, 1894 ; Frijda, 1986 ; Kafka, 1950 ; McDougall, 1923 ; Ribot, 1907 ; Sartre, 1939 ; Wundt, 1900. â Lâexpression Ă©motionnelle comme attitude relationnelle 29 Les Ă©motions se conçoivent difficilement sans leur dimension expressive. Les actions dĂ©terminĂ©es par les dispositions Ă lâaction montrent que les Ă©motions ne sont pas que des perturbations internes, comme Descartes lâavait bien relevĂ©. Elles reprĂ©sentent des phĂ©nomĂšnes se dĂ©roulant entre un sujet et un objet, quâil soit rĂ©el ou imaginĂ©. Elles relĂšvent dâattitudes envers cet objet, dans la perspective de Bull 1951 et de Deonna et Teroni 2012, ou de positions adoptĂ©es envers lâobjet Frijda, 1953, des attitudes qui peuvent se manifester dans des actions rĂ©elles. Les dispositions ne sont pas des attitudes se dĂ©ployant au sein du sujet. Elles ne se dĂ©ploient pas dans le sujet. Elles se dĂ©ploient entre le sujet et lâobjet. On essuie une remarque offensante et on y rĂ©pond par une action destinĂ©e Ă blesser lâoffenseur et Ă le dĂ©courager de persister dans son action. Les dispositions Ă lâaction instituent un certain type de relation avec lâenvironnement. Câest pourquoi lâĂ©motion est un processus relationnel. Elle se dĂ©roule entre le sujet et lâobjet. Elle est dans cette relation agissante. 30 Le terme expressif » signifie que la comprĂ©hension du comportement implique la comprĂ©hension de la signification du comportement. Lâobservateur ne perçoit pas le comportement expressif comme un mouvement vain ou insignifiant. Comme lâont soulignĂ© les approches gibsonienne, mais aussi gestaltistes et phĂ©nomĂ©nologiques, en matiĂšre de perception, la signification est inhĂ©rente au phĂ©nomĂšne expressif. Elles indiquent par lĂ le caractĂšre sĂ©miotique de la perception, câest-Ă -dire que ce qui est perçu lâest toujours comme expression qui fait sens » Visetti & Rosenthal, 2006. Tout comportement est porteur de sens, il vĂ©hicule des significations, câest pourquoi il est dit expressif ». De quelle façon ? Tout dâabord, la Gestalt psychologie a mis en exergue le fait que lâenchaĂźnement des mouvements est pourvu dâorganisation unitaire Kölher, 1929. La conduite dâune personne est organisĂ©e de maniĂšre Ă concorder avec lâorganisation de son projet motivationnel en cours. Il y a continuitĂ© de ses intentions. Cette organisation est perçue par autrui, câest-Ă -dire que le comportement exprime » cette organisation. Les mouvements apparaissent comme un courant cohĂ©rent de faits visuels. Plus prĂ©cisĂ©ment, le comportement expressif se prĂ©sente sous la forme dâun flux continu et, par consĂ©quent, en tant que flux continu, il parvient Ă lâobservateur comme un tout » Toniolo, 2009. Son caractĂšre cinĂ©tique est fondamental la dynamique motrice du comportement expressif participe de son organisation. Toute rupture de continuitĂ© de ce flux, câest-Ă -dire toute modification du fil » de la conduite, traduit la mise en place dâune nouvelle organisation motivationnelle, dâun nouvel Ă©tat intentionnel. Cette discontinuitĂ© est comprise comme telle par lâobservateur. Notons que la discontinuitĂ© ne doit pas seulement ĂȘtre conçue comme un changement brutal ou radical du flux comportemental. La rupture de continuitĂ© se traduit aussi par le changement de rythme et/ou dâintensitĂ©. Lambie et Marcel 2002 Ă©voquent Ă cet Ă©gard les qualitĂ©s prosodiques » des comportements Ă©motionnels. Comme le souligne Kölher 1929, lâexpression Ă©motionnelle partage les caractĂ©ristiques de lâexpression musicale. De la mĂȘme façon que les indications de mouvement, de phrasĂ© et de nuance figurant sur la partition permettent Ă lâinterprĂšte de confĂ©rer toute son expression Ă la musique, mouvement, phrasĂ© et nuance confĂšrent toute son expressivitĂ© au comportement. En musique, le mouvement ou tempo dĂ©signe lâallure Ă laquelle une mĂ©lodie doit ĂȘtre interprĂ©tĂ©e. Il correspond au rythme de battement de mĂ©tronome allegro animĂ© par exemple. Le phrasĂ©, lui, se rapporte aux fluctuations dynamiques les changements de tempo accelerando par exemple. De mĂȘme, dans le domaine comportemental, le mouvement expressif peut durer ou non, peut apparaĂźtre brusquement ou plus graduellement. Au fur et Ă mesure que sâinstalle le souvenir de lâinjustice dont elle a Ă©tĂ© victime, la personne marchera avec une vitesse croissante, au rythme de son indignation grandissante. Dans la dynamique musicale, les nuances dĂ©signent la variation dâintensitĂ© dâune note ou dâun accord, dâune phrase, etc. sforzando câest-Ă -dire accentuation soudaine dâintensitĂ© par exemple. Les termes crescendo et diminuendo correspondent aux changements progressifs dâintensitĂ©. La personne exaspĂ©rĂ©e de devoir rĂ©pĂ©ter sa rĂ©ponse Ă son auditeur inattentif la criera violemment en derniĂšre instance. Ainsi, les propriĂ©tĂ©s temporelles du mouvement de mĂȘme que celles relatives Ă ses nuances renvoient au mode intentionnel du comportement expressif. 31 Le caractĂšre intentionnel du comportement expressif renvoie au fait que le comportement est saisi comme interactif. La perception du mouvement est la perception dâune relation [16]. En situation rĂ©elle, lâobservateur perçoit le sujet comme se comportant dans un contexte donnĂ© et comme rĂ©agissant Ă ce contexte câest-Ă -dire le systĂšme sujetâobjet. Aussi le sujet est-il perçu comme interagissant avec son environnement, comme rĂ©pondant activement Ă quelque Ă©vĂ©nement de son environnement comme prĂȘtant attention Ă quelque chose, comme ayant un mouvement de recul face Ă quelque chose âŠ. Lorsquâon voit que les yeux dâune personne sâorientent dans une direction particuliĂšre, ce qui se trouve dans cette direction est aussitĂŽt mis en rapport avec ses yeux, son visage et lâensemble de sa personne. Autrement dit, les traits du visage du sujet et/ou la position des membres de son corps sont pourvus dâun contenu intentionnel. Par exemple, des yeux grands ouverts et des sourcils levĂ©s ne sont pas de simples globes luisants surmontĂ©s dâune touffe de poils. Ils sont pourvus de rĂ©fĂ©rence intentionnelle ces yeux regardent quelque chose ou quelquâun. Par consĂ©quent, la signification dâun comportement expressif expression faciale ou posturale correspond Ă son caractĂšre intentionnel », câest-Ă -dire impliquant une relation entre un sujet et un objet vers lequel le sujet sâoriente. Kölher 1929 souligne que cette mise en relation sujetâobjet est lâun des principes perceptifs mis en avant par la Gestalt psychologie le groupement perceptif. Cela est Ă©galement vrai lorsque, par exemple, la personne sâĂ©carte. Ici encore, la rĂ©fĂ©rence Ă un objet apparaĂźt clairement Ă lâobservateur. Si la personne sâĂ©carte, câest quâelle Ă©vite quelque chose. Le sujet est perçu comme rĂ©pondant activement Ă quelque Ă©vĂ©nement de son environnement et non comme un-individu-exprimant-une-Ă©motion » câest-Ă -dire comme signalant quelquâĂ©tat Ă©motionnel interne. Du reste, la perception de la signification Ă©motionnelle nâest pas dâordre sĂ©mantique, elle nâimplique pas nĂ©cessairement lâattribution dâun Ă©tat interne. Les enfants de quatorze mois donc non verbalisĂ©s de lâĂ©tude de Gergely, Bekkering et KirĂĄly 2002 dĂ©gageaient lâintention des actions quâils observaient chez des adultes pour Ă©laborer leurs propres actions cf. aussi Rossano, 2012. Lâexpression perçue ne va donc pas au-delĂ du fait perceptuel. Comme lâaffirme Toniolo 2009, le comportement expressif donne lieu Ă une connaissance subjective au sens phĂ©nomĂ©nologique du terme. Il parvient Ă la conscience de celui qui le perçoit comme un donnĂ© immĂ©diat exempt de mĂ©diation conceptuelle ». Ainsi, le visage ou les gestes dâautrui ne sont pas vus comme isolĂ©s mais comme une Gestalt, câest-Ă -dire une-personne-en-mouvement-dans-une-certaine-situation » et interprĂ©tĂ©e comme telle. LâintentionnalitĂ© qui est, comme on lâa vu plus haut, au cĆur de lâĂ©motion est Ă©galement au cĆur de lâinterprĂ©tation de son expression. Câest pourquoi lâon peut avancer que la signification reconnue dans un comportement expressif est la prĂ©paration Ă lâaction du sujet, câest-Ă -dire la façon dont il se relie ou ne se relie pas Ă son environnement Ă un moment donnĂ©. En effet, le comportement expressif est perçu immĂ©diatement dans sa dimension intentionnelle. De fait, lorsquâon compare le taux reconnaissance dâexpressions faciales dâĂ©motions mesurĂ©e soit par lâassignation de modes de dispositions Ă lâaction soit par celle de noms dâĂ©motions, les rĂ©sultats montrent que les taux de reconnaissance sont Ă©quivalents Tcherkassof, 1999 ; Tcherkassof & de Suremain, 2005. La reconnaissance de la signification dâun comportement expressif correspond donc Ă la reconnaissance de la prĂ©paration du sujet Ă Ă©tablir une relation avec lâenvironnement, et surtout Ă la reconnaissance de la forme de la relation approcher, rejeter, se cacher, se soumettre. De la sorte, Ă©motion et comportement expressif sont Ă©troitement liĂ©s car les Ă©motions, prĂ©cisĂ©ment, sont des dispositions Ă lâaction. 32 Les phĂ©nomĂšnes expressifs les gestes, la dĂ©marche, les jeux de physionomie, le ton de la voix, la prosodie reflĂštent toute la complexitĂ© des dispositions Ă©motionnelles le mĂ©lange dâattrait et de rĂ©pulsion, de curiositĂ© et de mĂ©fiance, une bienveillance mĂȘlĂ©e de froideur, une cordialitĂ© un peu dĂ©daigneuse, etc. On peut rire dâun trait dâhumour sans se dĂ©partir tout Ă fait de son angoisse dâun bilan de santĂ© ; on peut sâattrister du malheur dâautrui sans se dĂ©partir tout Ă fait de son bonheur dâĂȘtre enceinte. Lâexpression Ă©motionnelle peut se comparer Ă un langage dont les rĂ©flexes, tombĂ©s pour la plupart sous la dĂ©pendance de la volontĂ©, en composeraient le vocabulaire et dont la syntaxe, naturelle chez lâanimal, serait chez lâĂȘtre humain, en grande partie socialisĂ©e. Par exemple, lorsquâune personne peu ou pas familiĂšre sâapproche de lui, lâenfant soit dĂ©tourne son regard, soit sâĂ©loigne, soit se dissimule derriĂšre les jupes de sa mĂšre. DĂšs que lâon cesse de sâoccuper de lui, il jette de temps Ă autre un regard furtif du cĂŽtĂ© de lâintrus. Le sens apparent de cette conduite est trĂšs clair et se perçoit directement ce nâest pas tant une rĂ©action de timiditĂ© ou de peur quâune rĂ©action de dissimulation. Pour Burloud 1938, il sâagit trĂšs probablement lĂ dâune rĂ©action instinctive accordĂ©e, dans le passĂ© ancestral, Ă lâexpĂ©rience de longues gĂ©nĂ©rations dâindividus qui ont appris Ă leurs dĂ©pens le danger de se livrer naĂŻvement Ă autrui, prĂ©dateur en puissance. Ainsi, des correspondances fonctionnelles Ă©tablies par la mĂ©moire, par les habitus et par lâhĂ©rĂ©ditĂ© relient un comportement expressif aux dispositions Ă©motionnelles quâil manifeste extĂ©rieurement voir aussi Oatley et Jonhson-Laird, 1987. Bien que lâexpression Ă©motionnelle puisse se comparer Ă un langage, les signes qui composent ce langage nâappellent pas une lecture analytique. Les comportements expressifs ne sont pas tout dâabord saisis dans leur morphologie, morphologie qui serait ensuite interprĂ©tĂ©e. Les expressions faciales, par exemple, ne sont pas de simples suites dâunitĂ©s dâactions cf. les Actions Units du FACS dâEkman et Friesen, 1978 dont la configuration morphologique Ă un instant t serait le prototype dâune Ă©motion donnĂ©e et par consĂ©quent identifiĂ©e comme telle. Les conduites expressives, expressions faciales comprises, rĂ©organisent le champ de lâobservateur et Ă©tablissent une Gestalt, comme la succession de notes de musiques Ă©tablit une mĂ©lodie. Câest pourquoi mĂȘme lâĂ©motion dâexpressions inauthentiques » peut malgrĂ© tout ĂȘtre reconnue. Ainsi, Guillaume Duchenne de Boulogne, neurologue du XIXe siĂšcle, explique dans son ouvrage sur lâexpression des passions que lâartiste ayant façonnĂ© la fameuse sculpture antique du Laocoon, exposĂ©e au musĂ©e du Vatican, a commis une erreur de modelage puisquâaucun visage ne saurait exprimer lâexpression Ă©motionnelle arborĂ©e. En effet, aucune contraction musculaire ne saurait la produire. Il rectifie la faute » en prĂ©sentant une statue ayant une tĂȘte identique mais dont le visage est modelĂ© en respectant la physiologie des mouvements expressifs de la face. Sa dĂ©monstration prĂȘte Ă rĂ©flexion bien quâaucun systĂšme dâanalyse objectif ne puisse coder les Ă©lĂ©ments faciaux discordants dâun visage tel que celui du Laocoon, nâimporte qui est pourtant en mesure de reconnaĂźtre la douleur morale et le dĂ©sespoir quâil exprime admirablement ⊠â LâĂ©motion un patron de rĂ©ponses multi-componentielles 33 Concevoir lâĂ©motion comme patron de rĂ©ponses multi-componentielles permet de rendre compte de la grande variĂ©tĂ© des manifestations Ă©motionnelles. Dans le langage courant, le mot Ă©motion » est utilisĂ© pour dĂ©signer des rĂ©ponses manifestant lâexcitation vigoureuse du systĂšme nerveux autonome et autres mouvements vĂ©hĂ©ments comme des grimaces faciales, gestes prononcĂ©s des mains, gesticulations des bras, courir Ă toute vitesse, donner des coups de poing, fracasser des plats, crier Ă voix haute ⊠Mais les cinq modalitĂ©s de base peuvent se manifester de façons bien diffĂ©rentes. Il y a autant de manifestations simples et subtiles quâil y en a de grossiĂšres, amples ou violentes. Certaines peuvent ĂȘtre Ă©laborĂ©es, dâautres fragmentaires un battement de paupiĂšres en rĂ©ponse Ă une remarque dĂ©nigrante, un froncement des sourcils Ă peine perceptible lors dâun souvenir douloureux, lâinterruption de ses pensĂ©es pour regarder briĂšvement dans le vide, ou un simple regard foudroyant adressĂ© Ă son contradicteur lors dâune controverse. Le plus dissimulĂ© des composants est celui des rĂ©actions limitĂ©es aux actions neuronales, comme celles observĂ©es et enregistrĂ©es lors des expĂ©riences de Jeannerod 2006, et qui ne se manifestent peut-ĂȘtre que seulement au sujet Ă travers ses sentiments conscients. Lâoccurrence dâune Ă©motion peut ne consister quâen une seule action impulsive, ou en une suite dâactions qui partagent la mĂȘme modification de relation, comme dans une querelle oĂč insultes, reproches, coups et menaces sâenchaĂźnent. Les suites dâactions peuvent manifester une prĂ©sĂ©ance radicale, ou montrer une certaine retenue ou contrĂŽle, celle qui adoucit les reproches et modĂšre la violence ou transforme la brutalitĂ© de lâapproche Ă©rotique en la rendant douce et gentille. Les actions peuvent Ă©galement ne consister quâen une seule fraction dâaction, comme les yeux devenant juste humides ou lâattitude du corps seulement un peu tendue. Une expĂ©rience dâĂ©motion peut encore ĂȘtre limitĂ©e Ă des expĂ©riences conscientes de lâĂ©valuation dâun Ă©vĂ©nement ou dâune disposition Ă lâaction, sans quâil nây ait aucune activitĂ© motrice. Câest le cas lors de lâobservation attentive des mouvements dâautrui, qui donne lieu aux activitĂ©s de neurones de miroir » Rizzolatti et al., 1999, et lors des Ă©motions raffinĂ©es » Frijda & Sundararajan, 2007, câest-Ă -dire des Ă©motions entiĂšrement virtuelles, suscitĂ©es lors de lâimagination dâune action ou Ă©voquĂ©es par lâempathie avec une personne perçue ou par une description verbale Frijda, 2013. 34 Lâ Ă©motion » peut dĂšs lors ĂȘtre dĂ©finie par des manifestations prononcĂ©es, comme les grandes agitations, autant que par des manifestations bien moins saisissantes voire modestes, mais traduisant toujours lâune des modalitĂ©s de base. Ainsi, certains Ă©pisodes de chagrin sont trop grands pour les larmes ; certaines marques dâamour ne se manifestent que par une caresse fugace ou par une attention et une rĂȘverie que la passion seule peut donner » Madame de La Fayette, La princesse de ClĂšves. Quoi quâil en soit, le mot Ă©motion » est gĂ©nĂ©ralement rĂ©servĂ© pour les rĂ©ponses multi-componentielles dâune durĂ©e plus ou moins brĂšve â entre quelques secondes et plusieurs jours. Câest la durĂ©e des rĂ©ponses aiguĂ«s telles que les excitations du systĂšme nerveux autonome, les dispositions Ă lâaction et autres engagements interactifs avec un antĂ©cĂ©dent Ă©motionnel. 35 Mais les effets de telles rĂ©ponses ne se limitent pas Ă leur phase aiguĂ«. Elles laissent des traces cognitives et sociales durables. De fait, un prolongement caractĂ©ristique de tout Ă©pisode Ă©motionnel est le partage social des Ă©motions qui sâen ensuit quasi inĂ©vitablement RimĂ©, 2009. Elles entraĂźnent aussi des changements dans la relation Ă lâobjet. La rencontre avec lâami avec qui lâon vient de se quereller est dorĂ©navant plus rĂ©servĂ©e. On pourrait appeler ces traces des attitudes affectives latentes ». Le patron dâĂ©valuation prĂ©alable Ă lâĂ©pisode Ă©motionnel est dorĂ©navant modifiĂ©. Ce nouveau patron suscite dĂ©sormais une nouvelle disposition Ă Ă©prouver certaines Ă©motions â ou attitudes corporelles â envers lâobjet. La seule mention du nom de lâami provoque maintenant une froideur qui nâexistait pas avant. 4. â Conclusion 36 La psychologie oscille depuis toujours entre une approche physiologique de lâĂ©motion et une approche intellectualiste, nĂ©gligeant ainsi, dans la vie affective, ce qui est authentiquement affectif. Dans la vie courante, le terme Ă©motion dĂ©signe en premier lieu des phĂ©nomĂšnes expĂ©rientiels extra » ordinaires. Comme lâont soulignĂ© Aristote ou Descartes, ces phĂ©nomĂšnes sont marquĂ©s par une dimension cinesthĂ©sique qui leur est caractĂ©ristique. En effet, les ressentis Ă©motionnels sont des perceptions de lâengagement dynamique du corps dans lâinteraction. Pourtant, la qualitĂ© cinesthĂ©sique des Ă©motions a toujours Ă©tĂ© dĂ©laissĂ©e par la plupart des thĂ©ories psychologiques. Cet article prĂ©sente les arguments plaidant en faveur dâun modĂšle perceptif de lâĂ©motion qui trouve sa place entre une vision naturaliste et une vision intellectualiste. Ce modĂšle perceptif, qui sâinscrit dans une conception relationnelle du concept dâĂ©motion, explicite le lien entre intentionnalitĂ© et phĂ©nomĂ©nologie, deux dimensions des Ă©motions que les thĂ©ories psychologiques ont jusquâĂ prĂ©sent peinĂ© Ă concilier. Il accorde un rĂŽle central Ă la cinesthĂ©sie, faisant de lâĂ©motion une relation sujetâobjet transitoire conçue dans un systĂšme perceptionâaction Warren, 2006. 37 Cette contribution propose ainsi des arguments en faveur de lâidĂ©e que les Ă©motions sont des attitudes corporelles exprimant la relation du sujet Ă lâobjet Ă©motionnel. Ces arguments sont basĂ©s sur les rĂ©centes avancĂ©es des sciences cognitives notamment en matiĂšre de cognition incarnĂ©e. Ces avancĂ©es dictent lâabandon dâune description catĂ©gorielle en faveur dâune description fonctionnelle des Ă©motions. En effet, le recours au concept de fonction » permet de dĂ©laisser celui de substance » auquel Ernst Cassirer 1908 avait recours et Ă sa suite de nombreux psychologues. La psychologie dâinspiration naturaliste a fait de lâĂ©motion une substance, substance qui saisit » la personne. LâĂ©motion ne saisit pas. Elle nâenvahit pas. Elle ne sâinstalle pas en transit ». LâĂ©motion sâincarne. Elle se matĂ©rialise sous la forme dâune relation Ă lâobjet. LâĂ©motion est lâattitude prise vis-Ă -vis de lâobjet qui requiert cette rĂ©ponse, elle est la disposition Ă lâaction requise par lâobjet. Les Ă©motions sont ainsi des relations transitoires, ce sont des rapports Ă lâobjet Ă un moment donnĂ©. Lâattitude adoptĂ©e constitue le rapport Ă lâobjet instaurĂ© par la personne. Lâattitude est une mise en relation ; et la perception de lâattitude est la perception de cette relation. Câest pourquoi tout comportement a un sens, sens qui est saisi par lâobservateur. Le sens nâest pas surajoutĂ© lâenfant qui pleure son doudou perdu nâest pas un enfant qui exprime » sa tristesse », câest un enfant dĂ©sespĂ©rĂ© par cette perte. La tristesse nâest pas une substance qui viendrait saisir lâenfant et sâexprimer Ă ses dĂ©pens ». Les pleurs de lâenfant relĂšvent dâune sĂ©miose, câest-Ă -dire un ensemble signeâcontexteâsignification » Rosenthal & Visetti, 2010. Le comportement expressif de lâenfant traduit son attitude, sa relation Ă lâobjet, qui est ici une relation de perte. 38 Les avancĂ©es actuelles des sciences cognitives soulignent le soubassement moteur des Ă©motions et Ă©tayent la conception relationnelle prĂ©sentĂ©e ici. Lâapproche neuro-phĂ©nomĂ©nale soutenue par Northoff 2012, en particulier, Ă©largit le concept de cognition incarnĂ©e en dĂ©fendant lâidĂ©e que les Ă©motions sont constituĂ©es de la relation triadique environnementâcorpsâcerveau. Les donnĂ©es issues des recherches en neuro-imagerie sur les mĂ©canismes neuronaux sous-tendant les Ă©motions montrent ainsi que la relation entre lâenvironnement, le corps et le cerveau est constitutive de lâexpĂ©rience subjective Ă©motionnelle. De sorte que les diffĂ©rentes Ă©motions ou expĂ©riences subjectives Ă©motionnelles reflĂštent les diffĂ©rentes relations sujetâobjet, câest-Ă -dire les diffĂ©rentes relations au monde du sujet, dont les termes pour les dĂ©signer varient selon les cultures humaines. 39 Ce que le langage courant dĂ©signe par Ă©motion » sont des ensembles de phĂ©nomĂšnes comportementaux et expĂ©rientiels. Dans cet article, les noms dâĂ©motions â joie, tristesse, peur, etc. â pourraient disparaĂźtre. Ce que ces noms du langage courant visent Ă indiquer est ici remplacĂ© par les modalitĂ©s et fonctions sous-jacentes. Cette approche permet de dĂ©passer la controverse de la dĂ©finition de lâĂ©motion dans laquelle la psychologie sâest longtemps enlisĂ©e. Aucune dĂ©finition ne pourra jamais inclure tous les exemplaires Ă©motionnels, car il est impossible de fournir des descriptions uniformes complĂštes des exemplaires de tristesse », colĂšre », peur », honte », et de leurs Ă©quivalents dans dâautres langages. Il nâest pas possible non plus de fournir des taxonomies exhaustives dâexemplaires discrets. Câest ce quâont notamment soulignĂ© Barrett 2006, Russell 2003 et Scherer 2005. Dans la prĂ©sente approche du processus Ă©motionnel, les notions de modalitĂ©s ou de fonctions peuvent ĂȘtre appliquĂ©es Ă diffĂ©rents niveaux dâanalyse, du social au neuronal en passant par le niveau interactionnel. 40 Reçu le 29 mai 2013. 41 RĂ©vision acceptĂ©e le 25 novembre 2013. Notes [1] Remerciements. Les auteurs tiennent Ă remercier les experts anonymes pour leurs prĂ©cieux commentaires qui leur ont permis dâamender le texte original.
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